Le premier magistrat du pays est enfin sorti de sa réserve : il a annoncé hier sa décision de réviser la loi fondamentale. L'initiative présidentielle partage les formations politiques. Si le FLN et le RND ont applaudi l'« événement », le RCD et le FFS se disent opposés à cette démarche, alors que le MSP et le PT se donnent encore du temps avant de se prononcer sur la question. Pour le FFS, l'annonce de la révision de la constitution par le chef de l'Etat n'a rien d'inédit : c'est juste une levée du suspense. Cette décision, explique M. Tabbou, premier secrétaire du parti, ne change rien aux problèmes politiques, sociaux et économiques des algériens ni aux défis qui attendent l'Algérie. « Mis à part le personnel habituel qui meuble l'arène du pouvoir, l'annonce de la révision de la constitution n'apporte rien de positif à la population », observe M. Tabbou, qui est persuadé que le système répète insidieusement et impunément les mêmes manœuvres, en l'occurrence l'occultation des impasses politiques par le recours aux révisions, aux redressements et aux plébiscites. Le FFS note que « ce sont les mêmes bricolages, les mêmes fourberies qui aboutissent aux mêmes résultats, puisque le pays est géré loin de toute norme politique ». Les mêmes factions, selon le FFS, se relayent dans des alternances claniques par l'intrigue. « Rien n'a été épargné aux algériens : ni leurs richesses, ni leur mémoire, ni leurs vies. Encore moins leur avenir », a soutenu M. Tabbou, tout en rappelant que le FFS, fidèle à son engagement démocratique, s'oppose à cette stratégie d'accaparement, de putsch, de neutralisation et de régression politique et morale. « Nous restons intransigeants sur les questions d'éthique politique, de démocratie et de droits de l'homme. C'est cette intransigeance qui l'a (le FFS, ndlr) préservé de toute compromission ou complaisance avec le régime », a affirmé Tabbou. De son côté, le RCD se dit pas étonné de l'annonce de la révision de la constitution. « Une présidence à vie » « Cette révision était attendue », lance M. Khendek du RCD. Ce dernier rappelle les positions de son parti, précisant que l'objectif de la révision de la constitution n'est nullement l'amélioration des prérogatives des uns et des autres pour l'intérêt de la nation et de la gestion transparente des affaires publiques, mais permet surtout au chef de l'Etat actuel un troisième mandat, donc une présidence à vie. « La dangerosité de ce désir d'aller vers un troisième mandat réside dans la reconnaissance personnelle de l'échec de ses politiques », avance M. Khendek. Pour la formation de Saïd Sadi, ce n'est pas la composition des deux chambres parlementaires qui va faire obstacle à la volonté de Bouteflika de briguer un troisième mandat. « Les chambres parlementaires, la haute et la basse, sont issues de la fraude d'où le choix du président de s'adresser au parlementaire au lieu d'un référendum », a souligné notre interlocuteur, qui estime que « tout le monde sait que si le président opte pour un référendum, non seulement, l'abstention sera importante, mais le peuple sera contre cette révision », a précisé M. Khendek. Pour ce dernier, la nouvelle disposition consacrée à la promotion des droits politiques de la femme et à l'élargissement de sa représentation dans les assemblées élues, à tous les niveaux, est « un simple saupoudrage ». « Cet article est un véritable saupoudrage pour donner une certaine crédibilité à cette révision », a relevé M. Khendek. En outre, M. Djoudi, représentant du parti des travailleurs, estime que sa formation ne peut se prononcer sur un projet dont elle ignore le contenu. « Le président a usé de ses prérogatives constitutionnelles pour se prononcer sur la révision de la constitution et nous, au PT, nous ne donnerons notre position sur cette démarche qu'une fois décortiqués les différents changements opérés au niveau de texte de loi », a plaidé M. Djoudi. Même son de cloche au MSP, qui envisage de débattre de la question aujourd'hui au cours de la réunion de son madjliss echoura (conseil consultatif). Par ailleurs, dans un communiqué rendu public, Ahmed Ouyahia, secrétaire général du RND et chef du gouvernement, tout en se félicitant de cette annonce, appelle ses députés à défendre et à voter pour la révision de la constitution.