La même réticence a été observée chez les Européens, à l'exception de Londres. Depuis l'embargo décrété le 20 août 1990, l'Algérie a fourni du matériel utilitaire et des aides humanitaires au peuple irakien, et ce, dans le cadre de la légalité internationale et des résolutions de l'ONU. Face aux menaces américaines qui s'accentuent chaque jour un peu plus , le président irakien Saddam Hussein a dépêché plusieurs émissaires auprès des dirigeants arabes en vue de recueillir leur soutien. Après la tournée du vice-président Taha Yacine Ramadan dans les pays du Golfe, c'est le vice-Premier ministre Tarek Aziz qui a atterri, hier, à Alger. «Nous avons abordé la question de l'Irak, les menaces américaines contre lui et les positions à adopter par les pays arabes pour y faire face», a-t-il déclaré à la presse à l'issue des entretiens avec le ministre des Affaires étrangères algérien Abdelaziz Belkhadem, soulignant «la nécessité de lever l'embargo injuste imposé au peuple irakien». Les pays arabes, dans leur globalité, se sont publiquement opposés à l'idée d'une opération militaire contre l'Irak. Ces réserves, exprimées notamment en Egypte, en Jordanie, au Qatar, au Koweït, ont été confirmées en Arabie Saoudite, principal allié des Etats-Unis dans le Golfe. Les dirigeants arabes auraient signifié au vice-président américain Dick Cheney, durant sa tournée au Proche-Orient, qu'ils préféraient que Washington s'occupe davantage de trouver une solution au conflit israélo-palestinien plutôt que d'attaquer l'Irak. La même réticence a été observée chez les Européens, à l'exception de Londres. Cependant, ces réticences à une intervention armée ne semblent pas infléchir la position de Washington contre Saddam Hussein. Après avoir promis la semaine dernière de «s'occuper» de Saddam, le président Bush a exprimé lundi dernier sa volonté d'aller de l'avant, malgré le peu de soutient des pays arabes. Commentant la mission de Dick Cheney dans la région, des spécialistes américains ont estimé que l'opposition publique des Arabes «est un discours destiné à la consommation intérieure». «La vraie mesure du succès dépend de ce qui s'est dit dans les entretiens à huis clos, les engagements pris. Je ne crois pas qu'il faille juger le succès (du voyage de Cheney) à l'aune des déclarations publiques de certains pays arabes (...)», a confié Michèle Flournoy, une spécialiste au centre d'études stratégiques et internationales (Csis). La même interprétation a été faite par Scott Lasensky, expert au conseil sur les relations internationales à New York. «En ce qui concerne l'Irak, il semble y avoir une résistance, mais il reste à savoir s'il s'agit d'une rhétorique à usage intérieur (...)», a-t-il dit. Dans ce bras de fer, entre Bagdad et Washington, l'Algérie, qui a plusieurs fois condamné l'embargo injustement imposé au peuple irakien, s'est toujours inscrite dans la légalité internationale. Depuis cet embargo décrété le 20 août 1990, elle fournit matériel utilitaire (grues, tracteurs, camions) et aides humanitaires (produits pharmaceutiques, médicaments et denrées alimentaires) au peuple irakien, a organisé des foires industrielles ainsi que des campagnes de sensibilisation, et ce, dans le cadre des résolutions de l'ONU. Aussi, la position de l'Algérie dans ce conflit ne saurait s'inscrire hors du cadre des institutions internationales, que ce soit pour une éventuelle attaque contre l'Irak ou le retour des inspecteurs de l'ONU pour désarmer Bagdad.