Ils se sont réunis il y a moins d'une semaine. Aussi informelle qu'elle pût être, cette rencontre, organisée dans la demeure d'un sympathisant du parti, a permis, quand même, d'atténuer les convergences et de lisser les aspérités qui existaient au sein de l'ex-direction des derniers «fondateurs-légalistes» du parti dissous, ajoute notre source. Les leaders du parti, qui ne s'étaient plus retrouvés tous ensemble depuis au moins deux ans, s'étaient levés sur «la nécessité de resserrer les rangs et de voir dans quelle mesure un pas politique approprié serait envisageable». Ce premier pas fait, les choses ne devaient pas en rester là: il fallait trouver l'option, l'habillage et le programme appropriés pour mener à bien cette nouvelle démarche de la nébuleuse FIS, la première engagée depuis la création, il y a près de deux ans, de la Ligue appel à la nation (Rabitat nidaâ el-ouma), vaste conglomérat disparate de la nébuleuse islamiste. Cette Ligue était constituée de personnalités pesant sur la scène politique islamiste et dont la locomotive était l'influente Djamiaât el oulama el mouslimine, une institution religieuse, connue pour sa «démarche constitutionnelle» et bénéficiant d'un grand respect auprès des autorités. Là aussi, il semble que la décision a été prise. Les anciens du parti dissous ont porté leur choix sur Ennahda, précise une source crédible. Le choix du parti de Adami n'est pas fortuit, celui-ci a été, depuis deux ans, un grand soutien aux anciens du FIS. De plus, il présente la spécificité d'avoir été, à l'inverse de Djaballah et de Nahnah, très actif dans le conglomérat Ligue de l'appel à la nation, qui s'est «autosuspendu» depuis plusieurs mois. Finalement, c'est vraisemblablement sous l'habillage d'Ennahda et avec un programme «soft», version Rabitat el ouma, que les anciens du parti dissous vont entrer dans les prochaines élections. Ces choix, s'ils arrivent à être confirmés (car ils doivent être encore ratifiés par l'ensemble de la vaste nébuleuse islamiste), constituent un «morceau de choix» aussi bien sur les plans politique et juridique que sur ceux partisan et électoral, car ils induisent, de fait, de nouveaux paramètres à prendre en compte. L'absence des islamistes de l'ex-FIS de toute aire d'activité politique légale avait, depuis 1995, permis à d'autres mouvements islamistes de se projeter au-devant de la scène. Si, donc, aujourd'hui, le retour des anciens du parti dissous se fait - et il peut légalement se faire - il y a à attendre une nouvelle reconfiguration du placement islamiste dans les institutions de l'Etat. Mais il y a encore mieux : si cette option de l'ex-FIS de se mettre un autre habillage et d'opter pour une autre stratégie est moins «insurrectionnelle», plus constitutionnelle, il y a lieu, de fait, de se demander quelle représentativité à la CC-FIS qui, par la voix de Mourad D'hina, a appelé, il y a trois jours, au rejet des élections législatives. A moins que cet appel n'ait été qu'une propagande destinée à la consommation externe et, plus précisément, concocté aux fins de faire du forcing lors de la tenue de la 58e session des droits de l'Homme de l'ONU, qui se tient, justement, dans la capitale helvétique. La participation de l'ex-FIS à une joute électorale sous quelque emballage que ce soit, ne laissera pas les autres partis indifférents. Aussi bien pour les islamistes que pour les démocrates, le temps sera celui de la guerre des nerfs. Les premiers perdront de leur électorat, tandis que les seconds verront dans cette entrée du FIS «sur la pointe des pieds» un retour pour le moins impromptu et une menace ostensiblement présente. C'est dans ce cadre-là qu'il faut placer la participation ou, du moins, la présence de l'ancienne mouvance du parti dissous. Toutefois et dans tous les cas de figure, les repentis ne sont pas concernés par les élections. du moins, c'est ce que soutiennent leurs leaders à Relizane, à Larbaâ, à Jijel et à Collo. En attendant d'y voir plus clair.