On connaît beaucoup le côté écrivain, mais le côté anthropologue a été très peu développé. Mouloud Mammeri, le défricheur de savoirs, est le thème d'une conférence animée, lundi dernier à la Médiathèque Bachir-Mentouri, par l'universitaire Ali Sayad et ce, pour mettre en valeur l'apport de l'écrivain Mouloud Mammeri dans le domaine anthropologique. Ali Sayad, anthropologue et écrivain, est l'un des premiers à avoir codifié la langue berbère avec feu Mouloud Mammeri. Il a passé un certain nombre d'années dans les Aurès, le Hoggar, et diverses contrées du Sud. Il a publié entre autres: Habits traditionnels et structures familiales, Rites de naissance, Stratégies matrimoniales chez les Ath Yenni, et aussi un nombre importants d'articles d'étude, et assuré la bibliographie analytique de l'Afrique du Nord et du Sahara. «On connaît beaucoup le côté écrivain de Mouloud Mammeri, mais le côté anthropologue a été très peu développé» a indiqué, dans son introduction le conférencier, qui a été d'abord élève de Mammeri puis son collaborateur à l'ex-Centre de recherches anthropologique, préhistorique et ethnographique (Crape), actuellement Cnrpah (Centre national de recherches préhistorique, anthropologique et historique). «Le travail anthropologique de Mammeri, qui a sillonné l'Algérie de long en large, porte sur la littérature orale du Gourara, la poésie berbère et les poèmes de Si Mohand», a affirmé l'intervenant, ajoutant que «Mouloud Mammeri a été le premier, le défricheur qui a ouvert la voie de la littérature orale». «A l'ancienne ethnographie, il lui substituait de manière claire et définitive la terminologie anglo-américaine d'anthropologie sociale et culturelle sans délaisser le volet préhistorique, qu'il renforçait par ailleurs», a relevé Ali Sayad. A propos de Mouloud Mammeri qui fit, a-t-il dit, du Crape «un lieu de convergence de préhistoriens, d'anthropologues, de sociologues, de linguistes, de géographes et d'historiens nationaux et également étrangers». Outre les travaux menés par Mouloud Mammeri, sur le terrain, particulièrement durant la période 1969 à 1979 au cours de laquelle il était à la tête du Crape, l'intervenant a rappelé les séminaires organisés à l'époque. Mammeri a institué, a-t-il précisé, deux types de séminaires, l'un fermé, c'est-à-dire réservé uniquement aux chercheurs de l'institut qui discutaient, autour d'un programme intégré, pour faire bénéficier les recherches personnelles des avantages d'un travail en équipe et associer davantage les recherches entreprises dans le cadre de la réalité algérienne, et l'autre ouvert aux intervenants extérieurs qui venaient aussi bien des universités nationales qu'étrangères. «A ce type de manifestations, le Crape organisait des portes ouvertes pour recevoir étudiants et chercheurs extérieurs, leur permettant ainsi de bénéficier des nouveaux acquis scientifiques», a expliqué le conférencier. Il a également ajouté que «dans l'esprit de ces séminaires, étaient débattus les problèmes afférents à la validité épistémologique ainsi qu'aux présupposés idéologiques de l'anthropologie classique, avec comme perspective plus lointaine, la définition d'une anthropologie dont les pays du Tiers-monde ne seraient plus seulement les sujets mais les acteurs». Ali Sayad a aussi, à cette occasion, évoqué «l'initiative de Mouloud Mammeri de créer la revue Libyca dans laquelle étaient publiés des articles reprenant des travaux originaux en préhistoire et en anthropologie socioculturelle, ainsi que la bibliographie systématique et, par rubrique scientifique, du Maghreb. De l'intérieur du pays, qu'ils soient universitaires ou simples curieux, Da l'Mouloud les recevait et leur ouvrait la bibliothèque qui devenait ainsi le lieu privilégié d'un fonds documentaire», a conclu l'anthropologue. Quel plus bel exemple pourrait-on trouver, pour signifier la considération pour ce grand homme nommé Da l'Mulud. Notre tradition la plus profonde, consiste à lui rendre hommahe et de souligner l'indissociable solidarité entre les intellectuels et les artistes. Comme c'était le cas durant cette conférence, en l'occurrence, le conférencier avec ses témoignages et Mme Flora, la cantatrice avec ses chants rituels berbères et qui ne sont que des cris d'appartenance d'un peuple nomme les Berbères.