Rabat oublie deux choses. Primo, Tifariti est largement en dehors de la zone tampon. Secundo, aucun pays ne reconnaît la souveraineté marocaine sur les territoires sahraouis. Les sales besognes ont commencé avec l'entame, hier, à Tifariti (territoire libéré), au Sahara occidental, du 12e congrès du Front Polisario, représentant légitime du peuple sahraoui. Le Maroc, en trouble-fête, a accusé de «passivité» la mission de l'ONU au Sahara occidental (Minurso) pour n'avoir pas réagi à l'annonce par le Front Polisario qu'il tiendrait son congrès du 14 au 18 décembre à Tifariti, dans une «zone tampon» selon Rabat. Toute l'hystérie marocaine est liée au pourquoi de la tenue du congrès du Front Polisario à Tifariti, une localité située dans les territoires libérés du Sahara occidental, à quelque 70km à l'est du mur de défense marocain qui divise en deux le Sahara occidental sur plus de 2000km. Mais le Maroc semble ignorer deux choses des plus importantes. Primo, le dernier congrès du Polisario, le 11e, s'est tenu dans les mêmes lieux que la «zone tampon», dont parlait le chef de la diplomatie marocaine, Taïeb Fassi-Fihri, délimitée par l'Organisation des Nations unies à l'est du mur de la honte marocain. Cette zone tampon est large de 3 kilomètres et destinée à superviser le cessez-le-feu. Tifariti est donc largement en dehors de cette zone, contrairement à l'alarmisme que véhicule le Royaume chérifien comme fausse information. Secundo, le Maroc semble oublier, également, qu'aucun pays au monde ne reconnaît sa souveraineté sur les territoires du Sahara occidental. Et toute la problématique du dossier sahraoui est justement d'en déterminer le «propriétaire», d'où l'incontournable référendum d'autodétermination du peuple sahraoui. Le Royaume chérifien, désavoué à maintes reprises par la communauté internationale, faute d'arguments, a tenté une fois de plus, d'impliquer l'Algérie dans un conflit nettement cadré par l'ONU. C'est la deuxième fois consécutive que le Front Polisario tient son congrès dans cette zone libérée de Tifariti (le précédent ayant eu lieu en 2003). Tifariti, un territoire libéré Et c'est seulement en 2007 que Rabat s'avise de la chose? D'ailleurs, le fait même que l'ONU et la Minurso n'aient pas réagi à la tenue du congrès à Tifariti, la trouvant, en fait, normale, comme en atteste la présence à Tifariti de centaines d'invités étrangers venus prendre part au 12e congrès du Polisario, en dit long sur la roublardise du Maroc qui avance plus profondément dans sa fuite en avant. Comme le chef de la diplomatie marocaine, Taïeb Fassi-Fihri, qui, une fois encore, use de faux-fuyants devant une situation qui échappe de plus en plus à Rabat. Ainsi, à propos de la non-réaction de la Minurso, quant au lieu de la tenue du congrès du Polisario, le ministre marocain des Affaires étrangères, étrangement a déclaré: «le Polisario et l'Algérie vont interpréter ce manque de réaction de la part de l'ONU comme une incitation et un encouragement à leurs actes». Et une fois encore, un responsable marocain associe l'Algérie à un conflit dont elle n'est que l'observateur tout comme d'ailleurs la Mauritanie. Mais, Fassi-Fihri fait fausse route et les antagonistes du contentieux sahraoui sont connus de longue date et le Maroc n'a pas les capacités de changer l'histoire qui elle, est têtue. Les déclarations insensées du diplomate marocain expliquent, une fois de plus, les limites des arguments du Palais royal destinés à légitimer ce qu'il appelle «la marocanité du Sahara». Quant à la position de l'Algérie, tirée du passé révolutionnaire de notre pays, celle-ci va dans le sens d'un soutien pur et simple à un peuple privé de son indépendance et de son territoire et surtout de son droit à l'autodétermination. Cette même position de l'Algérie paraît plus honorable que celle de pays chantres «des droits de l'homme», car allant dans le sens des principes défendus par la Charte de l'ONU. C'est le Maroc qui se trouve en totale contradiction avec les principes des droits de l'homme et les fondements de la Charte onusienne. Le Front Polisario, en réponse aux dérives du diplomate marocain, a précisé, dans un communiqué diffusé, hier, que la République sahraouie (Rasd) «exerce sa souveraineté sur toute parcelle libérée de son pays légalement et il est chez lui à Tifariti». Le silence de l'ONU en dit long Le Front Polisario, seul représentant reconnu du peuple sahraoui, a indiqué également que «la propagande mensongère marocaine vise à semer la confusion et à berner, comme de coutume, l'opinion internationale». Et d'ajouter que cette «stratégie de tension, de confusion ne saurait cacher les crimes et les méfaits dont est coupable le régime d'occupation marocain au Sahara occidental». Le fait que l'ONU n'ait pas relevé la sortie injustifiable de Taïeb Fassi-Fihri traduit en fait un nouvel échec de la diplomatie marocaine. Pour revenir à la tenue du 12e Congrès du Front Polisario, notons que ce rendez-vous intervient dans un contexte international particulier, marqué par les négociations sous les auspices des Nations unies entre le Front Polisario et le Maroc. Les deux parties au conflit depuis 32 ans ont tenu, rappelons-le, deux rounds de pourparlers à Manhasset, dans la banlieue new-yorkaise, en juin et en août derniers, sans parvenir à une avancée notable, compte tenu de l'absence de volonté et de bonne foi de la part du Maroc. Un troisième round de discussions est prévu dans la même ville, en janvier prochain, selon le calendrier récemment rendu public par l'ONU. Ces négociations doivent, notamment ouvrir la voie à une solution politique du conflit du Sahara occidental qui respecte le droit à l'autodétermination du peuple sahraoui, comme le rappelle la résolution 1754 adoptée à l'unanimité, le mois d'avril dernier, par le Conseil de sécurité de l'ONU.