Il compte se manifester pour justement enrayer le processus engagé par le Président de la République. Alors que la situation en Kabylie est de plus en plus confuse, le gouvernement Benflis s'active pour mettre en oeuvre les dispositions, prises lundi par le Président de la République, lors du Conseil des ministres. A ce propos, le Chef du gouvernement rencontrera samedi les parlementaires pour leur exposer le projet de loi portant introduction de tamazight dans la Constitution comme langue nationale et les préparer à la séance de vote qui aura lieu probablement lundi prochain, à Club des Pins. Benflis aura la lourde tâche de réunir les parlementaires et surtout de convaincre des députés, qui ne veulent plus servir de «chambre d'enregistrement», pour faire passer un projet qui n'a bénéficié d'aucun débat en plénière. Si le principe est acquis chez la majorité des députés proches du pouvoir, en revanche, chez l'opposition et les islamo- conservateurs c'est l'occasion inespérée de revendiquer certains droits «légitimes», non accordés par le gouvernement, telles la retraite parlementaire où certaines indemnités non encore réglées. A cela s'ajoute, au volet politique le problème kabyle. Car loin de régler la crise, certains partis, qui s'affichent ouvertement comme fervents défenseurs de la cause arabo-baâthiste et qui n'ont jamais pris de position vis-à-vis de la question, risqueraient de sanctionner la Kabylie pour son audacieuse action politique qui a réussi à convaincre le chef de l'Etat à amender la Constitution. Ce sentiment, on le retrouve surtout chez les partisans du cheikh Nahnah qui a brillé par son absence, lors du discours du Président de la République annonçant la constitutionnalisation de tamazight. D'ailleurs, le leader du MSP n'a pas caché, lors des meetings qu'il a effectués au lendemain de cette annonce «historique», sa désapprobation contre cette entrée en matière de la langue amazighe dans la Constitution. Le MSP, qui n'a pas assisté aux réunions à l'APN, pour soi-disant préparer sa marche, de soutien au peuple palestinien aujourd'hui, entend faire entendre sa voix pour justement enrayer le processus engagé par le Président de la République et faire de la Kabylie un prétexte pour revendiquer un quota plus important dans la prochaine Assemblée. Le parti de Nahnah, qui dispose de 60 sièges dans l'actuelle Assemblée et de 2 au Conseil de la nation, ne peut pas faire le poids dans une Assemblée commune composée de 300 députés totalement acquis à la cause du Président, mais il entend influencer les autres partis islamistes comme Ennahda, très réservé sur la question et dans une moindre mesure El-Islah qui avait approuvé à demi-mot la proposition de règlement de crise du Président. En dépit de leurs divergences politiques, ces partis islamistes demeurent solidaires dans les questions relatives à la langue arabe et favorisent la consécration d'un pôle islamo-conservateur soudé contre les adversaires politiques et culturels de la pensée arabe. Ils espèrent porter leur étendard en compagnie d'une opposition minée par les querelles politiques mais qui préférerait marcher avec les islamistes qu'avec le pouvoir. C'est le cas notamment du FFS et un peu du RCD qui ont décidé de boycotter la séance de vote de lundi pour dénoncer la légèreté de la décision, mais surtout la répression violente en Kabylie. Seul le PT est sûr d'aller cette fois voter «positif» aux côtés des députés du RND et du FLN, considérant la décision du Président comme un pas positif pour le règlement graduel de la situation. Quoi qu'il en soit, l'adoption du projet de loi portant introduction de tamazight dans la Constitution comme langue nationale, même si elle est effective, risque, une nouvelle fois, de diviser la classe politique et de constituer, peut-être, un nouveau front contre les défenseurs de tamazight dans le pays.