Les habitants de Conakry affichaient une joie mesurée après la qualification de la Guinée pour les quarts de finale de la CAN-2008 au Ghana au terme d'une rencontre terne et stressante face à la Namibie (1-1). Le Syli national, qui a tremblé après l'égalisation de la Namibie à 10 minutes de la fin, a atteint les quarts pour la troisième fois d'affilée grâce au Ghana, tombeur du Maroc (2-0) dans le même temps. «On peut dire merci au Ghana. Ils ont joué le jeu et bien battu les Marocains, qui étaient nos concurrents pour la deuxième place» qualificative, résume Ibrahima Salif, un étudiant en agronomie de 21 ans. Bien avant le coup d'envoi de la partie lundi soir, les rues de la capitale s'étaient totalement vidées et le son des klaxons avait laissé place à un silence religieux seulement troublé par les rares soubresauts de ce match au couteau. Après avoir souffert jusqu'au coup de sifflet final, les supporteurs du Syli exprimaient leur satisfaction mais demeuraient lucides sur la performance de leur équipe. «C'est pas ce qu'on attendait du Syli. Il fallait prouver que sans Pascal (Feidouno, leur maître à jouer suspendu pour deux matches, ndlr), on pouvait faire quelque chose, mais la concentration manquait un peu», explique Abdoulaye Baldé, étudiant en informatique de 20 ans. «L'attente de toute la population guinéenne était la qualification pour les quarts, maintenant tout est possible si on continue à jouer sans complexe», poursuit-il après avoir assisté à la rencontre sous une des tentes dressées par des opérateurs de téléphonie mobile dans le centre-ville. Pour lui, «l'attachement de la population au Syli est dû à un "mariage de nationalité"» dans la mosaïque ethnique guinéenne. La multitude de drapeaux et fanions dressés sur la plupart des façades et véhicules à travers le pays témoigne de l'élan patriotique déclenché par la CAN. «On est juste fier d'être Guinéen!», clame Ibrahima en désignant son poignet éponge tricolore (vert, jaune et rouge). «Ça nous a donné du courage, ça, parce que le quotidien est vraiment difficile», relève de son côté Mathieu Bomi, un jeune policier. Mathieu rappelle que les exploits des footballeurs guinéens parviennent parfois «à faire oublier» les coupures répétées d'eau et d'électricité ainsi que la crise économique endurée depuis plusieurs années. «On va se soulager jusqu'à 6h du matin, on va être content, on va crier!», intervient soudain un jeune supporteur vêtu de vert de la tête aux pieds avant de se ruer en direction d'une des sonos installées pour célébrer la qualification au son des musiques locales. La Guinée devait attendre mardi soir pour connaître son adversaire en quarts, qui devait être probablement la Côte d'Ivoire, un des favoris de la compétition. Les yeux brillants, Fodé, boutiquier d'une quarantaine d'années, reconnaît que «la Côte d'Ivoire est une très grande équipe avec de très grands joueurs». «Mais j'ai l'espoir que le Syli arrive jusqu'au bout, inch'Allah», lance-t-il avant de verrouiller son échoppe de cartes téléphoniques. «On veut jouer les Ivoiriens, on préfère les bonnes équipes. On est toujours fort contre les grandes équipes», assure pour sa part Ibrahima, avant d'esquisser un pas de danse au son des premières notes crachées par deux enceintes posées au milieu de la route.