Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a déclaré mardi dernier au cours de sa première visite au Rwanda que le génocide de 1994 continuerait longtemps à «hanter» les Nations unies et la communauté internationale, accusées par Kigali d'avoir laissé faire les massacres. M.Ban s'est également entretenu avec plusieurs responsables rwandais, dont le président Paul Kagame, avec qui il a évoqué la situation dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC) voisine. Le génocide «va hanter les Nations unies et la communauté internationale pendant des générations», a déclaré M.Ban, lors d'une visite au mémorial du génocide à Kigali qui retrace la genèse et le déroulement des massacres. «Les Nations unies ont tiré une leçon profonde du génocide (...)», a-t-il ajouté. Accompagné de sa femme, il a déposé une gerbe de fleurs sur une fosse commune recouverte de béton, dans laquelle reposent 250.000 victimes des massacres à Kigali, avant de se recueillir en silence durant de longues minutes. ´´Plus jamais de génocide´´, a-t-il écrit dans le livre d'or du mémorial. Les autorités de Kigali dénoncent régulièrement la passivité de la communauté internationale, et notamment des Nations unies, durant le génocide de 1994, qui a fait 800.000 morts, selon l'ONU, essentiellement parmi les Tutsis et aussi les Hutus modérés. Sur un panneau du musée du mémorial, il est écrit: ´´Le monde se retira, et observa en silence, alors que se déroulait le massacre d'un million de gens.´´ Le prédécesseur de Ban Ki-moon, Kofi Annan, qui était au moment du génocide chargé des opérations de maintien de la paix de l'ONU, a plusieurs fois reconnu que son action avait été insuffisante pour prévenir les massacres. ´´La communauté internationale n'a pas été à la hauteur au Rwanda et cela devra toujours être pour nous une source de regrets amers et de chagrin´´, avait-il déclaré, à l'occasion du 10e anniversaire du génocide. M.Annan s'est rendu en 1998 et en 2001 au Rwanda. Une mission de maintien de la paix de l'ONU (Minuar) était déployée au Rwanda au moment du génocide, sous le commandement militaire du général canadien Roméo Dallaire, mais elle n'a pas arrêté les massacres, faute de renforts dont l'envoi nécessitait un vote du Conseil de sécurité. Pendant que les tueries faisaient rage, les effectifs de la Minuar avaient été réduits à environ 400 hommes. Après son entretien avec M.Kagame, M.Ban a loué les efforts accomplis par le Rwanda depuis le génocide. ´´Vous avez fait des progrès remarquables. De nombreux pays en Afrique devraient prendre exemple sur le Rwanda,´´ a-t-il déclaré. La question de la RDC a été au coeur des entretiens entre les deux hommes. A ce sujet, M.Ban a indiqué que la Monuc avait été renforcée pour ´´faciliter l'application´´ de l'accord signé en novembre par Kigali avec Kinshasa sur le désarmement et rapatriement des rebelles hutus rwandais présents dans l'est de la RDC et de l'«accord de Goma». Le 23 janvier, les groupes armés congolais actifs dans les provinces congolaises des Nord et Sud-Kivu, frontalières du Rwanda, ont signé à Goma un ´´acte d'engagement´´ pour la paix, dans lequel ils demandent expressément la mise en oeuvre du rapatriement des rebelles étrangers. Les rebelles hutus des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) sont réfugiés depuis des années dans l'est de la RDC. Ils sont accusés par Kigali d'avoir activement participé au génocide et sont considérés par la communauté internationale comme l'une des principales causes de l'insécurité dans la région africaine des Grands Lacs. Ban Ki-moon a quitté hier le Rwanda pour Addis-Abeba où il participera aujourd'hui au sommet de l'Union africaine.