L'envolée des prix de l'or noir est provoquée par la sévère glissade du billet vert face à l'euro ainsi qu'une crainte de la diminution de la production de l'Opep. Et de deux pour le baril. Le seuil des 102 dollars a été allègrement franchi à New York. Il faut dire que cette spectaculaire poussée avait déjà été amorcée la veille, mardi, où le baril de Light sweet crude s'était élevé en cours de séance, jusqu'à atteindre les 101,43 dollars. Celui du Brent de la mer du Nord a, quant à lui, réalisé, ce jour-là, tout simplement son record historique. Il venait de franchir, pour la première fois, cette fameuse barre symbolique des 100 dollars. Cette folle course en avant des prix du pétrole est imputée à la chute brutale du dollar américain face à la monnaie unique européenne. Mardi dernier, et pour la première fois de sa jeune histoire, un euro avait coté 1,50 dollar. La monnaie européenne ne s'est pas arrêtée en si bon chemin, puisqu'elle a établi un autre record, hier, elle a atteint 1,5088 dollar. Les analystes du cabinet indépendant John Hall expliquent ainsi ce phénomène: «Les mouvements sur le marché des devises fournissent, une fois de plus, un aiguillon au marché pétrolier, car ils rendent plus attirantes les matières premières libellées en dollars aux yeux des investisseurs achetant avec d'autres devises.» Costanza Jacazio, analyste chez Barclays Capital, ne partage qu'à moitié cette analyse: «La faiblesse du dollar a accentué la poussée des prix, mais ce sont des facteurs fondamentaux qui ont soutenu les cours au départ», a estimé ce spécialiste. La réunion prochaine de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, qui se tiendra le 5 mars 2008 à Vienne, en Autriche, sera sous haute tension sans aucun doute. Elle retiendra le souffle des pays consommateurs qui lui accorderont une attention toute particulière. Imaginons, en effet, un seul instant que l'Opep, qui a déjà pris, selon toute vraisemblance, la décision de ne pas augmenter sa production, procède, contre toute attente, à une baisse de cette dernière. Cela serait le plus mauvais scénario que le marché pétrolier commence à craindre depuis plus d'une semaine. Ce scénario catastrophe devrait, en toute logique, être exclu. Les déclarations du président de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, M.Chakib Khelil, abondent, en tout cas, dans ce sens: «Je peux vous dire que les ministres du Pétrole de l'Opep n'augmenteront pas la production, les stocks étant suffisants.» M.Chakib Khelil avait été rassurant, il y a déjà quelques jours, en déclarant que «l'Opep gardera sa production inchangée». Le ministre algérien de l'Energie et des Mines, qui a été interviewé par l'agence de presse Reuters, en marge de sa visite dans la capitale nigériane, Abuja, n'a pas exclu l'éventualité d'une baisse de la production de l'Opep au second trimestre de l'année. M.Chakib Khelil a été catégorique: «Si les raffineries demandent moins de brut à partir d'avril prochain, l'Opep fournira moins. Cette éventualité repose sur la demande mondiale qui, traditionnellement, tend à baisser de deux millions et demi de barils par jour en moyenne, au second trimestre de l'année.» Le président de l'Opep a assuré que, pour la réunion du 5 mars prochain, l'Opep «prendra en considération tous les paramètres du marché pétrolier. La probable récession de l'économie mondiale, les niveaux élevés des stocks pétroliers aux Etats-Unis et les analyses de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) qui prévoit un recul de la demande», a précisé M.Chakib Khelil. La position de l'Opep, qui produit 40% du pétrole mondial, a contribué à l'envolée des prix. La paranoïa gagne même le rang des spécialistes. «Avec de tels niveaux de prix, il semble de plus en plus probable que l'Opep maintiendra ses niveaux actuels de production», ont prédit les analystes de John Hall. Le compte à rebours a commencé. Tous les regards sont braqués sur la capitale autrichienne. Le baril de pétrole risque de casser la baraque.