L'Arabie Saoudite et des pays du Golfe posent leurs conditions à la participation au sommet arabe qui aura lieu à Damas. L'Arabie Saoudite et d'autres pays du Golfe boycotteront le sommet arabe prévu fin mars en Syrie si le Liban, plongé dans une grave crise politique, n'y est pas invité, a indiqué un responsable arabe. La Syrie, ancienne puissance de tutelle au Liban où elle appuie, dans la crise, l'opposition face à la majorité parlementaire, est décidée à garder la main sur les affaires libanaises au prix d'une absence de certains Etats ou d'une participation à bas niveau, estiment d'autres responsables arabes. Le Liban est en proie à une crise politique depuis plus d'un an en raison des profondes divergences entre la majorité antisyrienne, soutenue par l'Occident et l'Arabie Saoudite, et l'opposition, emmenée par le Hezbollah chiite et appuyée aussi par l'Iran. Ces divergences marquées par le refus de la majorité de l'exigence de l'opposition d'une minorité de blocage au gouvernement et une crise de confiance aiguë, empêchent l'élection par le Parlement d'un président au Liban, et ce, malgré différentes médiations dont celle de la Ligue arabe. «L'Arabie Saoudite et d'autres pays du Golfe attendent que la Syrie invite le Liban au sommet (prévu les 29 et 30 mars) pour décider de leur participation. Si le Liban n'est pas invité, ils n'iront pas», a déclaré, sous couvert de l'anonymat, le responsable de l'un de ces pays du Golfe. Pour lui, les informations échangées lors d'une réunion récente des six pays du Golfe -Arabie Saoudite, Koweït, Emirats arabes unis, Oman, Bahreïn, Qatar- «indiquent qu'il sera difficile d'élire un président au Liban car la Syrie veut avant cela négocier avec les puissances régionales et internationales sur deux questions: son rôle au Liban» et la mise en place du «tribunal international». Ce tribunal, créé par une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU, doit juger les assassins de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri, tué en 2005 à Beyrouth dans un attentat imputé à la Syrie. Celle-ci, contrainte de retirer ses troupes du Liban deux mois après cet assassinat, dément toute implication. Pour ce responsable, qui était récemment en visite à Damas, le président syrien Bachar al-Assad «n'a pas répondu aux conseils amicaux d'aider à appliquer le plan arabe au Liban et s'est plaint que Riyad ignorait la Syrie». Les pays du Golfe en ont conclu que la Syrie «est moins préoccupée par qui ira ou n'ira pas au sommet, que par garder la carte libanaise», a-t-il dit. Pour lui, le Liban doit participer au sommet. «Soit un président est élu le 11 mars (date de la prochaine séance du Parlement) et il sera invité, soit l'invitation sera adressée au gouvernement légitime du Premier ministre Fouad Siniora», issu de la majorité. La Constitution libanaise stipule que le gouvernement assume les pouvoirs présidentiels en l'absence d'un chef d'Etat, mais le Hezbollah ne reconnaît plus la légitimité du cabinet Siniora depuis la démission de six ministres de l'opposition en novembre 2006. Cependant un responsable saoudien a affirmé que son pays participerait «en principe» au sommet, mais attendait le résultat d'une réunion ministérielle arabe aujourd'hui au Caire. Il n'a pas dit le niveau de la délégation saoudienne envoyée au sommet, auquel ni Riyad ni Beyrouth n'ont pour l'instant été invités. Selon un diplomate d'un pays du Golfe, Riyad estime que «la Syrie bloque la solution arabe au Liban, et a été trop loin dans ses relations avec l'Iran aux dépens de ses liens avec les pays arabes». Pour lui, Damas «est prêt à résister aux pressions pour ne pas abandonner la carte libanaise. Il est dans l'intérêt de la Syrie de perpétuer le vide politique et constitutionnel au Liban, car elle ne peut pas, actuellement, garantir l'installation d'un régime loyal à Beyrouth».