Dix mois après avoir largement élu Nicolas Sarkozy, les Français retournent aux urnes demain pour un scrutin municipal qui devrait sanctionner un président en chute libre dans les sondages et faire perdre de nombreuses villes au parti de droite au pouvoir. Dopée par l'impopularité du chef de l'Etat, l'opposition socialiste espère faire oublier ses déchirements internes en enlevant quelques métropoles à valeur de symbole national comme Marseille (Sud-Est), Toulouse (Sud-Ouest) ou Strasbourg (Est). A l'issue du second tour, le 16 mars, les socialistes devraient, en outre, conserver sans problème leurs deux «joyaux» municipaux, Paris et Lyon (Centre-Est), deux villes conquises lors du précédent scrutin en 2001. Le parti UMP au pouvoir - qui dirige environ 55% des 230 villes françaises de plus de 30.000 habitants - ne cache pas que son ambition est de limiter les dégâts, insistant sur l'importance des «enjeux locaux» pour contrer la menace d'un vote anti-Sarkozy. Les notables de droite ont donc évité de faire venir sur leurs terres un président toujours hyperactif mais dont l'action est désapprouvée par deux Français sur trois, selon un récent sondage. Nicolas Sarkozy a décroché dans l'opinion depuis le début de l'année. Il a été touché de plein fouet par les critiques sur l'étalage de sa vie privée -marquée par un divorce retentissant suivi par un mariage, trois mois plus tard, avec l'ex-top-model Carla Bruni - ou son goût affiché du luxe alors que les Français font de la baisse de leur pouvoir d'achat leur préoccupation numéro un. Dans ce contexte, la plupart de ses multiples annonces se transforment en autant de polémiques, comme lorsqu'il a souhaité confier la mémoire d'un enfant juif, victime de la Shoah, à chaque écolier de 10 ans. Et son image a pris un coup supplémentaire lorsqu'il a traité de «pauvre con» un visiteur du Salon de l'agriculture qui refusait de lui serrer la main. Dans un entretien jeudi au Figaro (droite), M.Sarkozy a minimisé l'échec attendu de son camp aux municipales au regard de son mandat présidentiel qui court jusqu'en 2012. «Mon rendez-vous est clair: c'est la fin du quinquennat», a-t-il assuré. Il a écarté la perspective d'un «plan de rigueur», dont le spectre est brandi par les socialistes, et promis de maintenir le rythme des réformes. Il a aussi réaffirmé sa confiance au Premier ministre François Fillon, dont la cote monte dans l'opinion, contrairement à la sienne, malgré les rumeurs de dissensions entre les deux hommes. Ces municipales s'annoncent également difficiles pour le parti centriste MoDem de François Bayrou, troisième homme de la présidentielle qui brigue la mairie de Pau (sud-ouest), et le Parti communiste qui tente de sauver ses derniers bastions locaux. Quant au Front national (extrême droite), saigné financièrement par ses récentes défaites électorales, il ne présente qu'un nombre réduit de listes. Pour les 44,5 millions d'électeurs français, le scrutin municipal revêt une importance particulière dans la mesure où le maire est, selon toutes les enquêtes, leur élu le plus connu et le plus apprécié. Le vote des 9 et 16 mars permettra de désigner, au total, quelque 36.000 maires et un demi-million de conseillers municipaux. Il sera aussi l'occasion de renouveler la moitié des conseillers généraux, qui administrent les départements. Un des candidats de ces élections cantonales est suivi avec une attention particulière: Jean Sarkozy, 21 ans, qui se présente à Neuilly-sur-Seine, l'ancien fief de son père en banlieue parisienne. Il a toutes les chances d'être élu dans cette ville huppée ancrée à droite, malgré les critiques de l'opposition sur l'instauration d'une nouvelle «monarchie héréditaire».