Le chef de l'Etat kenyan et le chef de l'opposition tentaient, hier, d'aplanir les divergences sur un cabinet de coalition. Le président kenyan réélu, Mwai Kibaki et Raila Odinga, appelé à occuper le poste de Premier ministre, tentaient, hier, lors d'une rencontre cruciale, d'aplanir leurs divergences sur la composition d'un gouvernement de coalition visant à sortir le pays d'une crise majeure. Les deux hommes se trouvaient dans les bureaux du président Kibaki pour cette réunion à l'issue incertaine largement couverte par les télévisions kenyanes qui ont interrompu leurs programmes religieux dominicaux. «Les deux leaders se rencontrent et nous attendons de voir si un gouvernement sera annoncé aujourd'hui» (hier), a déclaré à le porte-parole du gouvernement Alfred Mutua. Alors que les deux hommes avaient affirmé, jeudi, être tombés d'accord sur la taille et la composition de ce gouvernement prévoyant la création d'un poste de Premier ministre destiné à M.Odinga, leurs deux camps ont affiché leurs désaccords profonds par communiqués interposés. «Nous avons reçu (...) deux lettres du président Kibaki et de l'ambassadeur Muthaura (membre du gouvernement de M.Kibaki) indiquant que le cabinet serait nommé sur la base d'une liste de ministres établie par le Parti de l'unité nationale (PNU, de M.Kibaki) le 1er avril 2008», avait affirmé l'ODM dans un communiqué. Selon l'ODM, cette liste avait été rejetée par M.Odinga et a, depuis, été amendée par les deux leaders lors de leur rencontre, jeudi, à Nairobi. De son côté, l'actuel gouvernement kenyan a rejeté la responsabilité de ce retard sur le camp de M.Odinga. «Aujourd'hui, le président Mwai Kibaki a demandé à l'honorable Raila Odinga de lui soumettre ses propositions pour les nominations dans le gouvernement. Le président attend toujours cette liste», avait expliqué, samedi, le gouvernement. MM.Kibaki et Odinga étaient parvenus, sous la médiation de l'ancien secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, à un accord le 28 février pour former un tel gouvernement - accord entériné à l'unanimité par le Parlement le 18 mars - pour régler la crise kenyane. Cet accord prévoit la création d'un poste de Premier ministre, inexistant jusque-là au Kenya. La contestation de la réélection de M.Kibaki a plongé le Kenya dans une crise politique majeure qui a fait 1500 morts et plus de 300.000 déplacés. La presse et les commentateurs politiques kenyans ont fustigé ces derniers jours la taille pléthorique du gouvernement (40 ministres), jugeant un tel cabinet ruineux pour les finances publiques d'un pays où 60% de la population vit avec moins d'un dollar par jour. Le gouvernement, dont la difficile mise en place augure mal de son bon fonctionnement, aura la lourde responsabilité de s'attaquer aux grandes lignes de fracture de la société kenyane, aux termes mêmes de l'accord de réconciliation nationale du 28 février. La crise postélectorale a, en effet, jeté une lumière crue sur une répartition inégale des richesses, des conflits fonciers récurrents et meurtriers, des relations entre communautés ethniques souvent tendues et une vie politique en grande partie déterminée par ces appartenances ethniques. Dès le début des consultations entre les deux camps, la formation de la coalition gouvernementale a donné lieu à d'âpres négociations sur la répartition des postes et la taille du gouvernement. M.Odinga plaidait pour un gouvernement de 34 membres, tandis que le camp de M.Kibaki évoquait un gouvernement de 44 ministres et insistait pour conserver des postes-clés tels que les ministères des Finances et de la Fonction publique.