Le baril toucherait la barre de 200 dollars dans les deux années à venir et cette flambée s'inscrirait dans la durée. Des analystes ont imputé la tendance haussière des prix du pétrole à une série de facteurs, notamment les inquiétudes suscitées par les crises du Moyen-Orient, les perturbations dans les zones de production de pétrole au Nigeria et la hausse de la demande des économies émergentes (Chine et Inde). En dépit du léger recul des prix, hier, à 120,40 dollars (9h25 GMT), les analystes s'attendent à ce qu'une baisse plus prononcée des réserves de brut ou d'essence au sein du plus important consommateur d'énergie au monde fasse flamber les prix davantage. Le baril de light sweet crude, pour livraison en juin, gagnait mardi 1,87 dollar à 121,84 dollars après avoir, auparavant atteint un record à 122,73 dollars dans les échanges. A Londres, le Brent de la mer du Nord gagnait, quant à lui, 2,32 dollars à 120,31 dollars le baril après avoir atteint un record à 120,99 dollars. Les prix se sont emballés à partir de la fin avril en raison des perturbations de la production nigériane du fait des attaques des rebelles et de la grève des travailleurs. Des facteurs ayant concouru au maintien de la tendance haussière des prix du pétrole qui ont sextuplé depuis 2002, dans le sillage de la vague haussière des prix des matières premières. Les prix ont également été influencés par la poursuite de la crise du programme nucléaire iranien, notamment suite au rejet officiel par Téhéran d'une nouvelle série de mesures incitatives proposées par les grandes puissances en échange du renoncement de l'Iran (membre de l'Opep) aux activités d'enrichissement de l'uranium. Quatrième producteur de pétrole dans le monde, l'Iran peut influer sur la sécurité du transport de pétrole dans la région du Golfe, notamment au niveau du détroit d'Ormuz. Des tensions auxquelles vient s'ajouter la situation dans le nord de l'Irak où les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) auraient, selon des informations, menacé de prendre pour cibles les forces et les intérêts américains. Une menace qui fait suite aux raids aériens menés par l'armée turque contre des positions des rebelles du PKK. L'augmentation de la demande des marchés émergents comme la Chine constitue, elle aussi, un facteur participant à la hausse des prix du pétrole. Les prévisions de M.F.Goldman, une des plus importantes banques d'investissement, ont accentué la tendance haussière des prix. Un mémorandum de cet organisme financier, qui a une influence considérable sur les marchés, indique en effet qu'«une multitude de facteurs concourent à la hausse des prix du brut dont la demande colossale de l'Inde et de la Chine, la dévaluation du dollar, les restrictions de l'Opep sur sa production, les menaces sur les approvisionnements en provenance d'Irak, d'Iran et du Nigeria et l'asphyxie des raffineries des Etats-Unis.» De la forte demande émanant des économies émergentes et de la multitude de problèmes auxquels l'offre est confrontée, la banque Goldman déduit que le prix du baril pourrait grimper, en l'espace de deux ans, à 200 dollars le baril en expliquant que cette flambée s'inscrirait dans la durée, loin d'être un pic furtif. «Nous pensons que la crise actuelle de l'énergie pourrait connaître son apogée dans le cas où la production s'avère insuffisante», indique le mémorandum de la banque Goldman, publié mardi, qui ajoute: «Nous prédisons une montée progressive à long terme plutôt qu'un pic soudain des prix du pétrole.» Autre conséquence de l'augmentation des prix du pétrole, l'érosion des profits des raffineries américaines qui ont ainsi été amenées à revoir à la baisse leurs capacités de production, d'où une inquiétude quant à l'insuffisance de l'offre chez le plus important consommateur d'énergie dans le monde, notamment à l'approche de la saison estivale. Face à la hausse des prix de l'essence, l'Administration américaine tente d'exercer davantage de pressions sur les pays producteurs de pétrole pour les amener à augmenter leur production au lieu de solliciter les raffineries pour élever leur productivité. Le président américain George Bush a affirmé que l'Opep est responsable de la hausse des prix du pétrole, l'appelant à relever sa production pour aider à la chute des prix, dans une tentative de dégager sa responsabilité de la hausse des prix de l'essence, d'autant que cette situation influencerait le choix des électeurs à l'approche des présidentielles américaines. L'opep a, pour sa part, souligné par le biais de son président, Chakib Khelil, ministre de l'Energie et des Mines, et dans son rapport mensuel, que la hausse des prix est due à la dévaluation du dollar et à la spéculation et pour d'autres facteurs indépendants de l'Opep qui maintient que le marché est suffisamment approvisionné.