Une omerta toute particulière entoure le traitement indigne réservé aux détenus algériens. Aller en prison n'est, certes, pas une sinécure. Mais, si c'est en Algérie, les choses semblent encore plus terribles. Ce qui se passe, ces derniers temps, dans certaines de ces institutions semble être l'ultime cri de détresse, mortel s'il en est, visant à attirer l'attention des décideurs sur le vécu inhumain dont sont victimes les détenus en Algérie. Un ancien responsable, qui a requis l'anonymat, nous dit qu'une omerta sans pareille entoure la manière avec laquelle sont traités les détenus. Selon lui, une véritable loi, celle de la jungle et de l'argent, supplante le règlement normal. Avec de l'argent, et même si les gardiens ne sont pas tous corrompus, loin s'en faut, il est possible de se procurer toutes sortes de choses, y compris la drogue et les boissons alcoolisées. Des boissons fraîches, venant du café du coin, entrent même normalement pour peu que le prix y soit mis. Les brimades et autres agressions vexatoires, elles aussi, sont monnaie courante. Une sorte de bizoutage a même lieu afin que les gardiens montrent bien qu'ils sont les maîtres des lieux. Quant aux vols et viols, ils se pratiquent de manière quasi systématique entre détenus, avec parfois la complicité des gardiens. Un détenu, quelles que soient les formes d'abus qu'il subit, ne peut s'en plaindre, même pas à son avocat si tant est qu'il en ait un. Censées être des maisons de rééducation, ces institutions vous apprennent, au contraire, les pires perversions, les meilleurs moyens de louvoyer avec la justice et même comment se faire une meilleure place dans le monde de la délinquance. Les anciens détenus, pince-sans-rire, vous disent que si vous entrez en prison avec une corne, vous en ressortez avec deux. En résulte un ras-le-bol dont les conséquences, certaines des conséquences, se voient à travers les incidents constatés ces derniers temps dans pas mal de prisons du pays. Notre source, qui précise qu'une prison vit toujours selon un régime spécial et qu'il serait vain de chercher à changer les choses, n'en ajoute pas moins que c'est le système de détention lui-même qui doit être révisé afin de revoir à la baisse le nombre de prisonniers en faisant en sorte, par exemple, que la détention préventive soit l'exception et non plus la règle, mais aussi de redonner sa vocation originelle à ces institutions en permettant aux détenus d'apprendre un métier pour se réinsérer normalement dans la vie active une fois payée leur dette à la société.