Ce qui, de prime abord, était un fait divers s'est transformé en «incident» diplomatique qui prend des proportions quelque peu démesurées. Le dernier développement en date de «l'affaire» Hannibal El Gueddafi a été l'arrêt, par les compagnies nationales libyennes de transport maritime et des ports des livraisons de pétrole à la Suisse, en représailles à la brève détention de Hannibal El Gueddafi, un des fils du dirigeant libyen Mouammar El Gueddafi, la semaine dernière à Genève. Ces compagnies auraient menacé la Suisse de «nouvelles mesures» si «elle ne ferme pas, dans les prochaines heures, le dossier de l'affaire montée de toutes pièces» contre Hannibal El Gueddafi et ne présente pas ses excuses. Dans un communiqué commun publié dans la soirée de mercredi, les compagnies nationales de transport maritime et des ports ont annoncé qu'elles ont «décidé l'arrêt des navires pétroliers libyens chargés de produits pétroliers en direction de la Suisse, le refus de décharger tous les navires suisses et l'interdiction d'entrée de ces navires dans les ports libyens». Les liaisons aériennes entre les deux pays ont été réduites, les entreprises suisses en Libye ont reçu un ordre de fermeture et les autorités libyennes ont suspendu l'octroi de visas aux ressortissants suisses. Les bureaux des groupes helvétique Nestlé et helvético-suédois ABB ont été ainsi fermés et leurs responsables ont été interrogés par la police, selon les deux groupes. Arrêtés depuis le week-end dernier, le responsable suisse d'ABB et un autre ressortissant suisse ont été accusés, jeudi, par la justice libyenne d'infractions sur l'immigration et le séjour, selon le porte-parole du Dfae, Jean-Philippe Jeannerat. Détenus dans des conditions «absolument dramatiques», les deux helvétiques «sont traités comme des immigrants illégaux», a-t-il dit à la presse à Berne. La Suisse s'attendait, hier, cependant à un déblocage rapide des tensions avec la Libye et a rappelé que l'approvisionnement en pétrole de la Confédération est assuré, a indiqué jeudi, une porte-parole du ministère helvétique de l'Economie. Hannibal El Gueddafi, 32 ans, au centre de la tension entre Tripoli et Berne est officiellement «conseiller» de la Compagnie libyenne de transport maritime qui détient un quasi monopole du transport du brut en Libye, avec une flotte de dix navires. Premier fournisseur de pétrole à la Suisse, la Libye avait menacé mercredi de stopper ses exportations de brut. Mais des spécialistes du secteur en Suisse avaient minimisé l'impact d'une telle mesure, estimant que la Suisse dispose d'autres sources d'approvisionnement. Tout a commencé le 15 juillet lorsque Hannibal El Gueddafi, le quatrième fils du leader libyen, et sa femme avaient été arrêtés à Genève, suite à une plainte de deux employés de maison qui les accusent de les avoir frappés. Ils avaient été libérés deux jours plus tard après avoir versé une caution de 312.500 euros. En 1997, un autre fils d'El Gueddafi, Seif Al Islam, était à l'origine d'une première crise diplomatique entre les deux pays, quand la Suisse lui avait refusé un visa d'études. Toutefois, Hannibal El Gueddafi est connu pour ses frasques et ses violences, notamment envers les employés des palaces européens où il eut à descendre. Des médiations diplomatiques ont été entreprises pour tenter de trouver une issue à une affaire à tout le moins scabreuse. Selon le journal suisse, Le Matin, l'Algérie aurait entamé une médiation entre Berne et Tripoli, afin de trouver une issue à la tension née entre la Suisse et la Libye. Cette médiation n'a pu être, toutefois, confirmée hier de source algérienne.