«S'il s'agit d'une fin de mission du RND, qu'on nous le dise.» Alors que le chef du parti, Ouyahia, sillonne le pays pour rafler les voix, les dissidents font à pas de course, la chasse aux signatures pour atteindre le quorum d'un conseil extraordinaire national du RND. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, il semble, selon MM.Aïssa Nouasri et Kahlouche, qu'Ouyahia va aux législatives avec un parti carrément gelé. «Le gel de tous les conseils de wilaya qui regroupent députés, sénateurs, élus de wilaya et de commune, n'est autre qu'une façon d'étouffer le parti, à moins qu'il ne soit question de quotas garantis pour Ouyahia», a noté M. Nouasri. « S'il s'agit d'une fin de mission du RND, qu'on nous le dise», s'exclame-t-il. Selon les mêmes interlocuteurs, la décision d'écarter les cadres du parti, qui ne répondent guère aux statuts et règlement intérieur, dès le début, a provoqué des réactions qui ne peuvent être que fatales au RND. Les fissures commencent déjà à apparaître. Pas plus tard que vendredi, déclare M.Nouasri, actuellement président de la sauvegarde du RND, le parti a perdu toute une wilaya. «Le P/APW, les membres de l'Assemblée de la wilaya d'El-Tarf ainsi que des élus de 11 communes ont d'ores et déjà quitté le parti en signe de protestations». Idem pour Sétif qui n'a, semble-t-il, pas été épargnée par la grogne. Selon Nouasri, pas moins de 14 chefs de bureau ont, quant à eux, «répudié» le RND, toujours pour les mêmes raisons, nous affirme-t-il. M.Kahlouche prend le relais sur un ton affirmatif en déclarant que d'autres wilayas vont suivre avec des démissions collectives: «Vous allez voir le nombre de communiqués de protestation qui vont déferler sur la presse (...). Les bureaux de wilaya lâchent Ouyahia.» M.Kahlouche est encore allé plus loin en affirmant que la contestation a commencé avant la vague d'exclusions, pas moins de 13 wilayas avaient fermé leur bureau à cause des listes électorales très controversées. Pour les deux exclus, tout l'enjeu réside dans le conseil national. L'avenir politique même de tous les initiateurs de la commission de crise pour la sauvegarde du RND se joue par la nécessité d'obtenir la signature de la majorité des membres du conseil national. Même la moitié du conseil ne garantit pas la victoire selon Ouyahia. «Il est capable de toutes les manoeuvres c'est pour cela que nous ne voulons aller à un conseil national extraordinaire qu'avec une majorité absolue, seule manière d'éviter les surprises.» La stratégie semble se préciser pour les dissidents d'Ouyahia, il s'agirait, en fait, d'exploiter à fond les différentes causes de contestation. Cela apparaît à travers les déclarations de nos deux invités qui n'écartent pas la possibilité de récupérer les victimes de la première vague d'exclusions du RND, en l'occurrence MM.Benbaïbèche, Bendakir et d'autres. Pis encore, en utilisant d'une manière abusive le terme «rassembleur», il est vraisemblablement certain que même des militants RND à tendance islamiste sont convoités par le camp de Nouasri. C'est justement ceux-là qui pourront jouer un rôle dans le maintien de l'embargo sur Ouyahia au niveau de la base. Par ailleurs, la contestation de la base quant aux listes de candidature proposées par Ouyahia pour la prochaine législature offre d'ores et déjà un terrain propice pour mener la bataille contre Ouyahia. Bien que le quorum pour un conseil national extraordinaire soit loin d'être atteint, les dissidents tentent tant bien que mal de frapper là où ça fait mal. La déferlante des communiqués de contestation qu'ont promise MM.Nouasri et Kahlouche, pourra nuire à la campagne électorale du parti, d'autant plus que le chef du parti doit mener un combat sur plusieurs fronts. D'abord en tant que ministre quant aux mutineries dans les prisons, contre les islamistes, le front du boycott et enfin contre ces militants déçus qui veulent carrément sa tête. Tout cela en 19 jours. La campagne promet des tournants plus dangereux les uns que les autres. Mais il est tout aussi clair que l'homme ne désarme pas pour défendre ses thèses. Ouyahia semble prêt à mener contre vents et marées la campagne électorale. En effet, pas moins de 20 wilayas sont à son programme. Tout en comptant sur sa force de persuasion et son charisme, les meetings qu'il a animés à Bordj Bou-Arréridj ou à Skikda lui ont plutôt donné envie de continuer en reportant la contre-attaque contre ses dissidents pour l'après-30 mai. ..