La décision de destruction de ce bidonville émane du tribunal de Hussein Dey, suite à un jugement datant de 2007. Haï Ezzitoun, un baraquement situé à la sortie sud-ouest de Aïn Naâdja, à Alger, a connu hier, une opération de démolition. En effet, c'est sous une offensive surprise de pelleteuses que les 240 familles qui le peuplent se sont réveillées. Les bulldozers qui ont investi le baraquement, très tôt dans la matinée d'hier, sont venus à bout, en moins de quatre heures, de pas moins six mansardes. Les habitants de ce quartier, improvisé vers la fin des années 80, ont, néanmoins vécu difficilement cette action de destruction furtive, mais imposée par une décision de justice. Un escadron de la Gendarmerie nationale a dû encadrer de près les bulldozers en action, rendant ainsi l'accès au «chantier» impossible. L'anéantissement des logis a été menée à huis clos, à l'abri même du regard de la presse. A peine les habitations de fortune, construites de parpaing et d'éternit furent détruites que des familles furent immédiatement livrées à leur sort, à la rue. Offrant ainsi aux passants un spectacle désolant de meubles éparpillés et autres victuailles empaquetées et gisant à même le sol, attendant, l'on ne sait, quelle destination prendre. Pendant toute la durée de cette besogne, gendarmes en uniforme et locataires des lieux se regardaient en chiens de faïence. Sur un large périmètre, l'atmosphère était lourde. Quelques quinquagénaires, les tempes grisonnantes et la mine marquée par des années de précarité, rappellent que Haï Ezzitoun a été érigé dès l'année 1989, alors qu'aucune loi ne l'interdisait! «Nous nous sommes installés ici, alors que les lieux étaient en friche, et faisaient office de véritable forêt!», déclare l'un d'eux, avec une colère contenue. Au fil de la discussion avec ces citoyens dont les propos traduisent une combinaison de colère et d'impuissance, nous apprenons que le terrain qu'ils ont occupé jusque-là, revient, désormais de droit, à un promoteur immobilier. «Les lots de terrain reviennent de droit à cette personne, finalement confortée dans son droit à deux reprises par la justice», reconnaissent-ils. Cependant, ils soutiennent que ces mêmes lots de terrain ont été distribués, à leur insu, à l'époque où Sid-Ahmed Ghozali était Premier ministre. Selon eux, cet ex- chef de gouvernement leur avait donné sa garantie qu'ils ne seraient jamais inquiétés quel que soit le cours que prendraient les transactions. Une garantie que leur a réitérée une commission communale en 2006, affirment-ils encore. Et c'est la mort dans l'âme qu'ils constatent l'éradication d'une partie de leur cantonnement. «Nous avons toujours vécu normalement ici, même pendant les années 90», soutient une personne d'un certain âge qui ressent cette action comme une injustice. Elle s'écrie: «On nous pousse au pire!» Vers 13 heures, et alors que les éléments de la Gendarmerie nationale qui ont pu jusque-là prévenir toutes velléités de violence, la situation dégénéra. En effet, et après que les hommes en uniforme eurent regagné leur unité, une émeute locale éclata. Pierres et autres objets hétéroclites ont brutalement servi à barricader l'artère principale dans les deux sens. Alors que par endroits, de denses volutes de fumée montaient au ciel. Dans l'après-midi d'hier, Aïn Naâdja se trouvait en effervescence.