«C'est quoi cette façon d'interrompre un match de football pour passer le discours des candidats?» Le printemps semble s'arrêter aux portes de Baraki. Poussière, routes défoncées et le jardin public interdit ... au public. Entre la kasma du FLN et le bureau du MRN de Djaballah, le café s'installe dans sa léthargie des petits jours. Les tables de la terrasse chauffées par la chaleur de midi s'étendent jusqu'à la devanture du bureau fermé de la permanence du MRN. «Les types de Djaballah sont allés manger», indique un employé du café. «Pourquoi voter?», se demande ce lycéen qui trempe son ennui dans une tasse de café déjà trop froid. «Nous connaissons déjà le résultat du vote», assure son copain qui confirme: «Ce sera Benflis, à coup sûr, il est le Chef du gouvernement et puis vous savez, les gars du FLN d'ici ne se prennent même pas la peine de distribuer leur programme... ils sont sûrs de leur victoire». A la question de savoir si ce groupe de jeunes ira voter le 30 mai, des hochements horizontaux de tête signifient clairement le «non!» alors que quelques-uns restent indécis: «On sait pas...», répondent-ils avec une expression de flottement. «De toute manière, ces élus-là, on les connaît bien, on les a déjà essayés», lâche cet autre jeune qui évoque le nom de Moh La Lumière! Il s'agit de l'actuel maire RND de Baraki. «Il n'a fait des efforts que pour l'éclairage, rien d'autre depuis cinq ans». Résultat: «On peut apercevoir Baraki de l'espace!». Suivent-ils la campagne électorale? «C'est quoi cette idée de couper un match de football pour passer le discours des candidats?», s'indigne l'un des fidèles du café pour résumer toute l'idée qu'il se fait de ce marketing politique made in Algeria. «Les passages télévisés sont trop rapides et trop imbriqués, on n'arrive pas à suivre ce que tout ce beau monde dit», remarque son ami. La vie suit son cours dans cette localité qui a connu le pire. «Les cybercafés sont ouverts jusqu'au matin et le terrorisme commence à être oublié...On n'en parle presque plus», confie le lycéen. Le groupe des jeunes du café regrette le boycott du FFS et du RCD. «S'ils étaient en course, peut-être que les élections seraient intéressantes», entonnent-ils, bien que, à l'unisson aussi, ils expriment leur priorité: «L'eau. D'ailleurs il faut que je me dépêche de rentrer pour m'occuper de la corvée des jerricans», lance l'un d'eux. Un peu plus loin, les gens du FLN, à l'intérieur du siège de la kasma locale donnent l'impression d'un enthousiasme débordant au milieu des affiches et du programme des meetings «populaires» qui doivent être animés à la Maison de culture et du Centre culturel. «Nous sommes prêts», s'empresse de déclarer un des militants du vieux parti. Il faut juste traverser la route pour rejoindre le bureau du RND. Une vieille femme est assise dans une grande salle à l'entrée: «Moi je voterai pour le ballet et la serpillière, ni pour le FLN ni pour le RND», clame t-elle très sérieusement. Le responsable du bureau local se montre très «serein». «C'est la grande forme», dit-il en poursuivant: «Il y a beaucoup à faire.» Effectivement.