La Lutte antiterroriste, l'Africom, les prisonniers algériens de Guantanamo, la question sahraouie...autant de dossiers à examiner lors de cette visite. La secrétaire d'Etat américaine, Condolezza Rice, est attendue cet après-midi à Alger. Qualifiée de porte-flambeau de la politique étrangère américaine, Mme Rice aura des entretiens avec le président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Le premier volet abordé lors de cette entrevue sera la lutte antiterroriste. Un domaine dans lequel les relations bilatérales algéro-américaines ont connu une notable évolution, notamment ces dernières années. La visite de la chef de la diplomatie américaine intervient à quelques semaines seulement de la série d'attentats kamikazes ayant ensanglanté le centre du pays. Les attaques successives menées, en août dernier, par la branche armée d'Al Qaîda au Maghreb islamique, ont fait près de 80 morts et une centaine de blessés. Une attaque que Washington n'a pas tardé à condamner. «Les Etats-Unis coopèrent avec l'Algérie dans la lutte contre le terrorisme et l'extrémisme (...) La stabilité et la prospérité de l'Algérie sont très importantes pour la stabilité de toute la région», a déclaré mardi dernier le nouvel ambassadeur des Etats-Unis en Algérie, David P. Pearce, après la présentation de ses lettres de créance au Président Bouteflika. Soucieux quant à la lutte antiterroriste, les Américains n'entendent pas se limiter à la condamnation des attentats suicides perpétrés en Algérie. Ils comptent ainsi renforcer la coopération sécuritaire avec Alger en prévoyant d'ouvrir une antenne du FBI (Bureau fédéral d'Investigation, chargé de la sécurité intérieure américaine) dans la capitale algérienne. L'option a été annoncée, en avril dernier, par le directeur de ce service de renseignement (intérieur) américain, Robert Mueller, «pour faire face aux nouvelles menaces en provenance du Maghreb». L'inquiétude des USA, quant à la recrudescence des actes terroristes en Algérie, a été émise en maintes occasions. «(...) Nous restons concernés par Al Qaîda au Maghreb islamique (...) dont les éléments continuent à commettre et à planifier des attentats et des attaques en Algérie. Cependant, nous sommes très satisfaits des efforts que fait l'Algérie afin d'atténuer la menace terroriste. Nous avons une excellente coopération avec votre pays dans ce sens» a déclaré, à L'Expression, le coordinateur du contre-terrorisme au département d'Etat américain, Dell L. Dailey. Un casse-tête nommé Droukdel Les appréhensions américaines se sont accentuées après les menaces formulées par Al Qaîda au Maghreb islamique. Dans une interview accordée, au début juillet dernier, au New York Times, le chef de l'ex- Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc), Abdelmalek Droukdel, avait été menaçant, affirmant que son mouvement, «n'hésitera pas à frapper les Etats-Unis quand nous le pouvons et où nous le pouvons, où que ce soit dans le monde». Abstraction faite de ces inquiétudes, les Américains n'ont eu de cesse de confirmer le rôle joué par l'Algérie dans la lutte contre le terrorisme, non seulement dans le Grand Maghreb, mais encore au Proche-Orient. C'est Condolezza Rice, qui est au fait de l'évolution de la situation sécuritaire dans la région qui avait affirmé: «En 2008, l'Algérie est un leader reconnu en Afrique du Nord et au-delà. L'Algérie est championne de la sécurité régionale et internationale». Au-delà de ces fleurs jetées à l'Algérie, les Américains souhaiteraient installer le siège de l'Africom (Centre de commandement militaire pour l'Afrique), sur le sol algérien. Un projet militaire trop cher aux yeux de Washington, d'autant qu'il vise, en apparence, à contrecarrer les attaques d'Al Qaîda dans le Grand Maghreb et au Sahel. Cependant, le niet catégorique signifié par les autorités algériennes risque de compromettre sa réalisation. Rappelons que le Pentagone avait estimé que l'Africom serait opérationnel à la fin septembre 2008. Il faut dire que la visite de la secrétaire d'Etat américaine intervient quelques jours après l'arrivée de M.Pearce, le nouvel ambassadeur US en Algérie, qui succède à Robert S.Ford. Ce dernier avait été vertement critiqué par Alger pour ses rencontres avec les partis politiques et certaines associations, portant notamment sur l'éventuelle révision de la Constitution. Considérant ce fait comme une ingérence dans les affaires internes du pays, les autorités avaient appelé M.Ford à plus de réserve. L'autre point qui devrait être soulevé lors de l'entrevue entre Condolezza Rice et le président de la République, est l'affaire des vingt-cinq (25) Algériens détenus dans la prison de Guantanamo, accusés de terrorisme après les attentats du 11 septembre 2001 à New York. Il est vrai que certains d'entre eux ont été transférés ces derniers mois à Alger. Néanmoins, le sort des autres prisonniers demeure en suspens. Commerce et crise sahraouie Sur le plan économique, les liens commerciaux entre les Etats-Unis et l'Algérie atteignent les 20 milliards de dollars par an, selon l'ambassade américaine à Alger, des sociétés américaines étant implantées, principalement, dans le secteur gazier et pétrolier. Les deux pays ont également signé, en juin 2007, un protocole d'accord dans le domaine du nucléaire civil, permettant de définir «les mécanismes de coopération et d'échanges d'expériences» et les «moyens de conduire des programmes communs», selon le ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil. Par ailleurs, Alger met à profit la visite de la secrétaire d'Etat américaine pour remettre sur la table l'épineux dossier du Sahara occidental. Les autorités algériennes tenteront d'expliquer le caractère de décolonisation du conflit sahraoui et convaincre les Américains de la nécessité d'appliquer les résolutions de l'ONU quant au droit des peuples à l'autodétermination, comme le stipule la Charte de cette organisation. D'autant que le mandat de l'ex-médiateur onusien au Sahara, le Néerlandais Peter Van Walsun, a expiré depuis quelques jours, et n'a pas été renouvelé par le secrétaire général de l'ONU du fait que l'ex-représentant onusien s'est permis de soutenir une partie tierce, outrepassant son mandat. Toutefois, notons que l'élection présidentielle américaine prévue pour le 4 novembre prochain aura, sans doute, des retombées sur le dossier sahraoui d'autant plus qu'il n'a pas été sérieusement pris en charge par l'administration sortante.