Ils pourraient être amenés à revoir à la baisse leurs revendications salariales. L'Angleterre se demande si la crise financière mondiale ne commande pas d'imposer des restrictions salariales à ses footballeurs millionnaires, pour soulager des clubs surendettés. Destinée à montrer que les joueurs étaient concernés par la crise, une anecdote de l'ancien attaquant Tony Cascarino, racontée dans sa tribune au Times, illustre la folle spirale salariale de ces dernières années. Selon l'ex-international irlandais, de nombreux joueurs, paniqués, ont récemment appelé leurs conseillers financiers. Avec une réaction récurrente quand leur était indiquée la garantie bancaire offerte par l'Etat britannique: «50.000 livres? Mais c'est une semaine de salaire...» Les stars peuvent tabler sur une paie dépassant allègrement les 100.000 livres hebdomadaires (135.000 euros). Cette politique des hauts salaires a permis d'attirer les meilleurs footballeurs du monde pour faire du championnat d'Angleterre un spectacle mondial et lucratif, affirment ses tenants, dont la très libérale Premier League, organisatrice de la compétition. «La dette n'est pas forcément une mauvaise chose», vient de se défendre son patron, Richard Scudamore, qui semble nager à contre-courant, dans le contexte actuel. Car l'inflation salariale est accusée par beaucoup, dont la fédération (FA), d'avoir accru la vulnérabilité des clubs, en ces temps de tourmente financière. Après avoir évalué les dettes globales du football anglais à trois milliards de livres (3,9 milliards d'euros), le président de la FA, David Triesman, a suggéré l'instauration d'un «salary cap», semblable à celui pratiqué dans le rugby anglais où la masse salariale ne peut excéder un pourcentage fixe du chiffre d'affaires. Les trois clubs les plus endettés sont Chelsea, Manchester United et Arsenal, qui se partagent les titres depuis 1996. «Dans le climat actuel, il se pourrait que nous devions travailler sur des restrictions salariales», a suggéré David Triesman, un ex-marxiste devenu travailliste qui prend soin de préciser qu'il aimerait instaurer cette règle «de préférence sans l'imposer». Le président de l'Uefa, Michel Platini, a évoqué une autre piste: la limitation du «nombre de contrats (de joueurs professionnels) dans les clubs». Des limites à l'endettement pourraient également être instaurées par l'Uefa, sous peine de sanctions, a déclaré son secrétaire général, l'Ecossais David Taylor. Mais quelle que soit la solution choisie, les clubs vont devoir trouver une solution et revoir à la baisse leur train de vie, selon le Pr Tom Cannon, spécialiste de l'économie du football à l'Université de Liverpool. «Le paiement global des intérêts est au moins de 70 à 120 millions de livres par an, sans doute 150 millions, ce qui est supérieur à la profitabilité de la première division. Les clubs doivent plus d'argent que ce qu'ils valent et les intérêts surpassent leurs profits. Ce n'est pas viable», estime-t-il. «Aucun autre championnat n'est aussi endetté que la Premier League et je serais surpris si sa domination (ndlr: sur le football européen) pouvait tenir au-delà d'une ou deux saisons», prévient l'universitaire. L'avertissement de David Taylor semblera plus sinistre aux oreilles des supporteurs: «Les gouvernements renflouent les banques. Pas un club de football.»