La psychologie d´un marché financier quelconque nous enseigne que lorsque ce marché ignore de telles informations, cela veut dire qu´il est sur le point de se retourner Durant la période de février jusqu'à juillet 2008, le prix du baril battait record après record, l´optimisme sur le prix du pétrole était euphorique, les médias financiers internationaux prenaient part à cette orgie spéculative en anticipant un prix de 170, 200, 250 et même 300$ sur le court et le moyen terme. Ensuite, c´était au tour des banques d´affaires américaines et internationales de se mettre en scène avec une révision à la hausse du prix du baril (en moyenne 180$ pour 2009). Mes longues années d´expérience dans les marchés financiers me disaient que l´histoire se répète et que ce scénario c´était du déjà vu, j´avais écrit un article contenant une étude exhaustive publié par le quotidien El Khabar en juin 2008 (le crude oil ce jour-là était coté à 138$) où j´avais mis en garde contre un effondrement des cours du prix du pétrole et mis en garde contre les opinions, anticipations des médias financiers internationaux et celles des banques d´affaires. Aujourd´hui en tant qu'Algérien, je peux dire, malheureusement que j´avais raison. Le prix s´est effectivement effondré et se négocie à 62$ (entre le 26 et le 29 octobre). Le pessimisme règne sur les marchés pétroliers, les médias financiers internationaux parlent maintenant d´un prix de 40-50 $ et une majorité d'experts pétroliers et d'économistes algériens, toujours influencés et impressionnés par l´expertise étrangère, se lancent dans des surenchères sur le prix du baril. Je suis d´un avis opposé à l´opinion du consensus et je considère que cette chute du prix est devenue exagérée. Quelles sont les arguments qui soutiennent une telle analyse? Ce qui a accentué la chute du prix du baril est, à mon avis, la crise des liquidités, c'est-à-dire la prise des bénéfices massifs et hystériques des spéculateurs pétroliers (les institutionnels, les hedgers, et les investisseurs particuliers). Preuve à l´appui, nous mentionnions le ratio cash/actifs des fonds d´investissement en pétrole. La position du cash exprimée sous la forme d´un pourcentage de la valeur totale des actifs des fonds d´investissement a fortement augmenté. Cela veut dire que ces fonds ont vendu leurs contrats à terme pétroliers pour faire face à la recrudescence des demandes de remboursements de leurs clients dans cette période de crise. 1- La corrélation positive entre le prix du pétrole et valeurs pétrolières cotées en Bourse: du 1er janvier au 26 octobre le prix du crude oil a enregistré une baisse de l´ordre de 32% alors que dans la même période, les actions cotées en Bourse des 5 grandes compagnies pétrolières (Exxon-Mobil, BP, Shell, Total, Chevron) ont connu en moyenne une chute de 16%. Cela montre que les investisseurs boursiers ne croient pas que cette chute du prix soit durable. 2- Les concepts de la force relative: le contrat à terme du crude oil du mois de décembre 2008 se négocie à 62,32$, celui de décembre 2009 à 69,16$, décembre 2010 á 74,70$, décembre 2012 à 81,46$, la différence en dollar entre le contrat de décembre 2008 et celui de 2012 est de 19 dollars. Ce grand écart explique que la chute actuelle est exagérée (dans un marché calme, la différence ne dépasse pas 4 dollars). 3- Les indicateurs contrariants: en sondant les lettres du marché pétrolier de la Market Vane on a constaté que le pessimisme des experts du marché pétrolier a atteint les 85% et, sur un autre front, nous constatons un pessimisme généralisé chez les médias financiers concernant le prix du baril et finalement les banques d'affaires américaines et internationales ont revu à la baisse leur prévision sur le prix du baril. La convergence des opinions de ces trois catégories d´experts nous donne une bonne indication sur un retournement imminent de la tendance du prix du baril et dans notre cas, c'est la tendance à la hausse qui s´annonce dans un avenir proche. 4- Les indicateurs psychologiques: de grands événements contenant des informations censées faire hausser le prix du baril ont été complètement ignorés par le marché; à titre d´exemple, la crise de Géorgie, les tempêtes et ouragans des mois d´août et septembre, les baisses de production de pétrole des pays de l´Opep, les chiffres du stockage du pétrole américain et de ses dérivés au-dessous des attentes des analystes, la baisse du marché des actions (négativement corrélées au marché pétrolier). La psychologie d´un marché financier quelconque nous enseigne que lorsque ce marché ignore de telles informations cela veux dire qu´il est sur le point de se retourner. 5- La neutralité des fondamentaux: le 3 février 2008, le prix du crude oil se négocie à 94$, le 11 juillet 2008 il était à 147,42$ et le 27 octobre à 62,34. Pendant tout ce périple alternatif, la demande mondiale en pétrole n´a pas connu un mouvement similaire. Ceci renforce l´idée que les fondamentaux ne jouent pas un rôle prépondérant sur l´orientation du prix. Même s´il y avait une baisse de la demande mondiale du pétrole prochainement, une grande probabilité s´impose sur le fait que cette baisse serait déjà intégrée dans le coût du pétrole actuel. 6- Le prix du baril et la récession économique mondiale: La plupart des médias financiers légitiment la cause de la chute actuelle du prix du pétrole à la récession économique mondiale qui frappe à la porte. Ce raisonnement peut s´avérer faux. L´histoire est le seul témoin pour dire que depuis 1876 à nos jours, le prix du baril a toujours connu des hausses pendant les récessions économiques aux Etats-Unis. Conclusion: Le prix du baril peut chuter encore de quelques dollars mais sur le moyen terme je suis convaincu que le prix se situera entre 80-90$ et pourrait même atteindre les 100$. * Analyste financier à la banque suédoise Hagström och Qviberg