Le ministre des Affaires étrangères est catégorique: l'Algérie a demandé à la France que les archives soient restituées. L'Algérie a-t-elle officiellement demandé les archives auprès de la France? Le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, est catégorique. «Oui, mais bien sûr», a-t-il clairement répondu en marge de la plénière consacrée au débat du Plan d'action du gouvernement tenue, hier, au Sénat. Revenant sur la déclaration de la Directrice des archives françaises, qui dit qu'aucune demande n'a été formulée, M.Medelci reste perplexe. «Nous sommes en contact depuis tellement longtemps sur la question des archives que la déclaration que vous prêtez à cette personne me paraît curieuse», a-t-il fait remarquer. Dans un article qui lui a été consacrée dans notre édition d'hier, intitulé «la France fait la sourde oreille», la directrice des Archives de France, Mme Martine de Boisdeffre a déclaré: «Il n'y a pas eu de demande de la part de l'Algérie sur une archive précise.» Ce témoignage est loin d'être un simple fait. La France vient de renvoyer la balle à Alger en lui imputant la responsabilité entière sur le problème des archives. Sûr de lui, le chef de la diplomatie algérienne refuse de polémiquer sur cette question. «Je n'ai pas d'élément supplémentaire sur ce point», a-t-il affirmé avant d'enchaîner: «La volonté affirmée à plusieurs reprises, y compris au plus haut niveau de nos Etats, l'Etat algérien et l'Etat français, nous souhaitons avoir enregistré les avancées que nous espérons substantielles sur la question des archives.» Interpellé sur cette question, le ministre des Moudjahidine, Cherif Abbas, a refusé tout commentaire. «Vous voyez avec le ministre des Affaires étrangères», nous a-t-il répondu. Pour sa part, le secrétaire général de l'instance exécutive, Abdelaziz Belkhadem a démenti cette information. «Cela ne peut pas être vrai parce que même dans les Accords d'Evian il y avait une clause: ce qui tombe dans le domaine public on n'a pas besoin de le demander. Dans le cadre de la négociation nous avons toujours demandé à nos partenaires français de restituer à l'Algérie ce qui concerne le devoir de mémoire», a-t-il déclaré dans les couloirs du Sénat. Le ministre d'Etat et représentant personnel du président de la République avance des preuves. «S'il n'y a pas eu de traité d'amitié, argumente-t-il, c'est parce que le devoir de mémoire n'a pas été suffisamment élaboré pour faire en sorte que la France coloniale soit excusée par la France officielle.» A la question de savoir s'il y a une possibilité de conclure le traité d'amitié, M.Belkhadem affirme que «si la France officielle reconnaît que la France coloniale est condamnable, cela pourrait faire l'objet de négociations». Ainsi, la version officielle des représentants du gouvernement ne laisse aucun doute sur les tentatives de restitution des archives. Cette question a toujours été de mise. Des voix ne cessent de s'élever pour revendiquer la restitution des archives nationales. Hommes politiques, personnalités historiques et présidents d'association demandent haut et fort l'accès aux archives. Ils veulent «décrypter la mémoire» de la nation. Ils expliquent ce refus de la France de remettre des archives, par la volonté de son administration de ne pas permettre aux Algériens d'accéder à leur passé. Saïd Abadou, le secrétaire général de l'Organisation nationale des moudjahidine (ONM), ne cesse de réclamer à la France «la restitution des archives réelles, celles qui ont été emportées et qui montrent les exactions commises en Algérie». Même revendication de l'Office national des archives algériennes. Abdelhamid Mehri, personnalité historique, persiste, lors de ses différentes sorties médiatiques, pour que l'on ne cesse de revendiquer la restitution des archives. A cette polémique, s'ajoutent les dispositions de la nouvelle loi votée par l'Assemblé nationale française définissant le temps imparti pour la consultation des archives dans le domaine public, à 100 ans.