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Le parent pauvre de la culture amazighe
AUCUN ROMAN PUBLIE EN 2008
Publié dans L'Expression le 04 - 01 - 2009

L'année 2008 s'est terminée sans qu'aucun roman en langue amazighe ne soit publié en Algérie.
Triste constat d'une langue pour laquelle des millions de citoyens ont milité pendant des décennies afin qu'elle puisse recouvrer ses droits après une interdiction ayant duré depuis l'Indépendance. Les écrivains berbérophones préfèrent écrire dans d'autres langues. Ils sont rares, très rares les romanciers en langue amazighe. Certains d'entre eux ont tellement été déçus qu'après la publication d'un premier roman, ils ont décidé de changer le fusil d'épaule.
Parmi les romanciers dont on n'a plus entendu parler depuis la sortie d'un premier roman, figure Ahmed Nekkar. Cet écrivain, originaire de la wilaya de Tizi Ouzou, a publié son premier roman Yugar Icerig tafawets, il y a environ douze ans. Son roman a reçu le Prix du meilleur manuscrit portant le nom de Mouloud Mammeri et décerné à l'époque, annuellement, par la Fédération des associations culturelles amazighes, que présidait l'universitaire Malika Ahmed Zaïd. Ahmed Nekkar, au lieu d'être encouragé afin de pouvoir persévérer sur le chemin sinueux de l'écriture, a buté sur plusieurs difficultés.
Celle qui l'a le plus déçu, c'est le fait qu'après avoir consenti des sacrifices énormes, son roman a eu du mal à se vendre dans les librairies. L'auteur, dont le roman est pourtant d'un bon niveau selon les spécialistes en la matière, découvre avec dépit qu'il n'y a pratiquement pas de lectorat en berbère. Tous les citoyens qui participaient aux manifestations revendiquant la reconnaissance de la langue berbère comme langue nationale, n'étaient pas forcément des lecteurs potentiels. L'aventure, plutôt la mésaventure de Ahmed Nekkar, est arrivée au moment où la revendication berbère était à son apogée. L'engouement sur le plan politique n'avait pas de prolongement sur le terrain purement culturel. La déception d'Ahmed Nekkar a été d'autant plus difficile à digérer car il avait édité son livre à compte d'auteur. On imagine les efforts que cette démarche impose. D'autres écrivains en langue berbère sont nés quelques années plus tard mais il leur a été pénible de s'affirmer. Les médias ne leur accordent pas trop d'importance. Dans les librairies, les étals consacrés à tamazight sont rares. Certains écrivains ont persévéré et ont pu s'imposer, à l'image de Brahim Tazaghart de Béjaïa ou de Tahar Ould Amar de Bouira. Tahar OuId Amar à longtemps galéré avant de pouvoir enfin publier son roman pour lequel il a obtenu le prix Apulée, décerné annuellement par la Bibliothèque nationale. Brahim Tazaghart a aussi édité un roman après plusieurs nouvelles et poèmes. Toujours à Béjaïa, Mohand Aït Ighil a signé son premier roman après avoir été prolifique dans les domaines de la traduction dramaturgique. D'autres tentatives d'écriture de romans en tamazight moins sérieuses ont au moins le mérite d'avoir existé. Mais souvent, les romans en question passent inaperçus à cause d'imperfections dépassant les limites tolérées.
Ces quelques tentatives sont venues après celles menées par des auteurs plus anciens et chevronnés à l'image du plus prolifique et plus entier des romanciers en tamazight, Amer Mezdad dont le statut d'écrivain est incontestable. Mais Amar Mezdad, jaloux de son indépendance, est resté tout le temps loin des feux de la rampe. Il est rare de lire une interview de Amer Mezdad dans les journaux. De là à s'acoquiner avec les officines des officiels, Amar Mezdad ne peut même pas y penser. Ahmed Mezdad écrit et publie. Quant aux honneurs et aux gratifications des officiels, Amer Mezdad n'en a cure. L'écrivain, médecin de profession, préfère l'humilité d'un Mouloud Feraoun à l'exhibitionnisme des écrivains de service. Et en fin de compte, c'est aux lecteurs de décider quel écrivain mérite d'être lu. Un autre romancier en langue amazighe a fait un parcours original, sans compter sur personne. Il s'agit de Salem Zènia dont la dernière production littéraire est un recueil de nouvelles paru aux éditions l'Odyssée. Depuis Tafrara, un recueil de poèmes paru aux éditions Tafrara de Paris, Salem Zénia a continué de consigner ses idées et ses opinions dans la langue berbère, avant de devenir une référence dans le domaine. Mais l'existence de ces auteurs de bonne foi ne suffit pas pour dire que le roman en tamazight existe. Dans les librairies d'Alger, il est pratiquement impossible de tomber sur un roman écrit en tamazight. C'est le constat établi suite à une tournée effectuée, jeudi dernier, dans les principales librairies de la capitale.


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