Alors qu'à l'intérieur les travaux de plénière se poursuivaient comme si de rien n'était, à l'extérieur les esprits s'échauffaient. Cacophonie générale! Après les manifestations de rue, le mouvement a gagné l'hémicycle Zighoud-Youcef. Des députés du MSP et d'El Islah, une cinquantaine, ont rejoint la rue pour exprimer leur solidarité avec le peuple palestinien. Cette décision a été prise suite au refus du président de l'APN de consacrer une session extraordinaire sur Ghaza. Ces derniers ont été rappelés à l'ordre par les forces de sécurité. A défaut de rue, les députés ont tenu un sit-in au sein de l'APN. Yala El aar, barlamane bela karar (C'est honteux, un Parlement sans résolution Ndlr), scandaient sans cesse les députés. Il faut reconnaître que la reprise des travaux de plénière s'est déroulée, hier, dans une ambiance électrique. Les élus du PT, du MSP, d'El Islah et même des indépendants sont montés au créneau. Ils ont tenté de faire pression sur le président de l'APN, Abdelaziz Ziari, pour changer le programme du jour et donner la priorité à Ghaza. En vain. L'idée n'a pas fait l'unanimité. «Celui qui veut exprimer sa solidarité n'a qu'à aller combattre», a répliqué un élu du FLN à l'adresse de ses confrères. De l'huile sur le feu. En réaction, les députés ont frappé sur le pupitre pour dénoncer cette attitude. Une bagarre a été évitée de justesse entre deux députés du MSP et du FLN, n'était l'intervention du président. «Le Parlement n'est pas un lieu de festival», a martelé M.Ziari pour dénoncer ainsi ce comportement. A propos de la revendication des protestataires, M.Ziari était catégorique: «Je ne peux pas ouvrir un débat où il risque d'y avoir des intervenants qui incriminent les actions de Hamas.» Se référant à l'article 130 du règlement intérieur, M.Ziari explique: «Les questions liées à la politique étrangère doivent être discutées par le Parlement (les deux chambres réunies)». Sans passer par trente-six chemins, le président n'a pas eu froid aux yeux pour rappeler à son équipe qu'une «minorité ne peut imposer son avis à la majorité». Message clair et précis pour les députés. Afin d'apaiser les esprits, M.Ziari a affirmé qu'une résolution politique a été discutée pour exprimer la position du Parlement sur les événements de Ghaza. Programmé à la fin de la session, ce projet a été présenté immédiatement aux députés. Or, ce communiqué «laconique» n'a pas été du goût des contestataires. Lesquels ont déserté les lieux dix minutes après l'ouverture de la séance. Pris de court, M.Ziari a vite réagi pour convaincre les députés à rejoindre leurs sièges. «Nous avons une proposition, celle d'envoyer une délégation parlementaire à Ghaza», a-t-il suggéré. Chose qui a poussé les élus à quitter en force l'hémicycle. «C'est inconcevable», «C'est aberrant et même honteux ce qui se passe au Parlement», «C'est honteux pour une institution de l'Etat», rétorquaient les uns et les autres dans les couloirs. L'APN a vécu hier une véritable pagaille. Alors qu'a l'intérieur les travaux de plénière se poursuivaient comme si de rien n'était, à l'extérieur les esprits s'échauffaient. Présente sur place, la secrétaire générale du PT a fortement exprimé son indignation. «C'est inconcevable que le Parlement ne consacre pas une session à Ghaza, alors que des Parlements de différents pays ont manifesté leur solidarité», a-t-elle clamé avec un air agacé. «Pourquoi n'y a-t-il pas de symbiose entre l'Assemblée nationale et la rue algérienne?», s'est-elle interrogée. Le président du groupe parlementaire du MSP, M.Isaâd a, de son côté, exprimé sa colère. «Il n'y a pas de volonté pour exprimer la solidarité avec le peuple palestinien», a-t-il affirmé en précisant que «le communiqué est laconique et il est loin d'honorer la position algérienne». En guise de protestation, le MSP compte boycotter les sessions. De son côté, M.Filali du parti El-Islah n'a pas mâché ses mots. «Ce qui se passe est regrettable pour un Parlement», a-t-il déploré. Enfin, il y a lieu de souligner que la proposition faite par M.Ziari quant à l'envoi d'une délégation parlementaire à Ghaza circulait de bouche à oreille. Les députés ont critiqué cette proposition qui n'a, selon eux, aucun sens. «Il nous prend pour des tarés alors que les aides humanitaires et les médicaments sont bloqués, il nous parle de délégation», s'est insurgé un député. Ce dernier n'est pas le seul à le dire. «Maintenant que nous percevons un salaire de 30 millions de centimes, je doute fort qu'il y ait un député qui souhaite partir à Ghaza», a ironisé un autre député. La vérité éclate enfin au grand jour.