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«Je suis la voix des ‘'sans voix''»
MOHAMED HADEF, PRESIDENT DU MNE À L'EXPRESSION
Publié dans L'Expression le 24 - 01 - 2009

C'est un Hadef confiant et serein que nous avons rencontré, jeudi au siège de son parti, le Mouvement national de l'espérance, (MNE) à Alger. M.Hadef est, comme il le dit, un «authentique Algérien» issu de la wilaya de Tlemcen. Agé de 59 ans, il est diplômé en 1981 de l'Institut politique de Paris. Il est, depuis 25 ans, membre de l'Institut français des relations internationales (Ifri). M.Hadef, l'un des candidats à la présidentielle d'avril, veut présider aux destinées de l'Algérie. Nous avons été voir Mohamed Hadef pour d'une part, faire le point avec lui, d'autre part, écouter la vision qu'il a du futur de l'Algérie.
L'Expression: Bonjour Dr Hadef, hadhi ghiba sur le plan politique. Comment expliquez-vous ce fait?
Mohamed Hadef: Tout d'abord, laissez-moi vous remercier pour cette question qui mérite pertinemment d'être posée à tous les acteurs de la scène politique nationale.
Me concernant, je vous dis que je n'ai jamais été absent mais j'étais plutôt silencieux. Je vous invite à faire la différence car, mon silence, je vous l'assure, n'a jamais été négocié. Ce n'est pas un silence d'«agneau» oignons ou de «renard». Je travaille solennellement mais silencieusement, car certains mécanismes d'information sont discriminatoires. C'est significatif. J'étais silencieux mais j'ai gardé les oreilles attentives et les yeux ouverts à scruter mon peuple. Pour être plus clair, je dirais que je suis la voix des «sans voix».
Vous êtes candidat à la présidentielle d'avril. Peut-on savoir les raisons de votre participation?
Je souhaite, avant de vous répondre, que chaque candidat soit conscient de la signification d'une élection présidentielle. C'est un bien commun et à partir de là, cette échéance appartient à tous les Algériens qui répondent aux conditions requises pour la participation.
C'est un droit garanti par la Constitution. C'est à partir de cette logique que nous avons décidé de ne pas laisser le terrain qui nous appartient de droit aux partisans du déclin, pour ne pas dire de la décadence. On participe non pas pour diviser, s'opposer ou dénigrer, mais pour dire haut et fort notre conception de la politique, objective, bien entendu, et non protocolaire.
C'est par devoir que je me présente, car il y a certains qui confisquent cette politique et nous, en tant que parti politique, nous n'acceptons pas et nous ne laisserons pas faire.
Je suis pour la noblesse de la politique et non pour la politique de la noblesse qui permet d'occuper un poste politique. Loin de là est ma conception de la chose politique. Je ne suis pas pour un Etat fort mais pour un Etat juste qui garantit ses droits au simple citoyen.
Et pour vos objectifs?
Là aussi, il faut dire que tous les candidats partants se tracent un objectif qui vise, généralement, la conquête du pouvoir. Pour un politologue, comme moi, mon objectif ce n'est pas de conquérir le pouvoir pour le pouvoir. Donc, il ne s'agit pas, pour moi, d'aller à la conquête du Palais d'El Mouradia à des fins strictement de pouvoir.
Mon objectif c'est d'expliquer, clarifier, défendre et dire qu'il y a une solution pour sortir le pays de sa situation actuelle.
Les autres candidats veulent, peut-être, la noblesse du pouvoir mais moi, je veux la noblesse de la politique. De ce point de vue, je peux affirmer que ma candidature est patriotique. Elle va défendre des solutions nationales aux crises multiformes que traverse le pays qui tourne autour de solutions improductives. Notre pays est dans un état comateux. Mon objectif en participant à la prochaine présidentielle est de dire qu'il y a d'autres politiques et d'autres stratégies à même de refonder notre démocratie et lui donner une consistance. C'est dire qu'il y a un comment républicaniser la République, jusqu'à la dépouiller, la démocratiser.
Mais ne craignez-vous pas d'être stoppé net dans votre élan par le problème que pose la collecte des signatures et d'être victime d'une élection que d'aucuns estiment déjà «scellée»?
Non, absolument pas. Je ne crains rien de tout ça, pour peu que les autorités chargées de la préparation du scrutin respectent leur engagement, notamment en ce qui concerne les formulaires de signature.
Nous avons reçu 100.000 formulaires que nous avons distribués dans 24 wilayas. Constatant que ce nombre est insuffisant pour couvrir au moins les 25 wilayas définies par la loi, on a pris attache avec le chargé de l'opération pour demander 50 000 autres formulaires. Ce même responsable nous a invités à revenir retirer ces imprimés quand on veut. Seulement et c'est ce que je déplore, jusqu'à présent et après 8 déplacements dans son bureau, aucune suite n'a été donnée à notre doléance. Dernièrement, il nous a signifié qu'il refuse catégoriquement de nous rajouter le reliquat des formulaires.
A partir de ce geste, des questions pratiques se posent d'elles-mêmes. De quel droit un fonctionnaire chargé des opérations électorales et de la bonne préparation du rendez-vous prochain et qui affirme que toutes les portes de son service sont ouvertes, refuse systématiquement de nous fournir un nombre suffisant d'imprimés pour valider notre dossier?
De quel droit prive-t-il 24 wilayas de formulaires de signature? C'est au moment où le président de la République, le Premier ministre et le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales font des efforts pour encourager et inciter les citoyens à aller voter qu'un simple fonctionnaire de l'administration, et c'est ce que nous ne comprenons pas, s'acharne à ne pas faciliter la tâche à un candidat qui demande simplement plus de formulaires pour répondre à l'attente des citoyens. C'est étrange et contradictoire entre les institutions de l'Etat et l'attitude d'un fonctionnaire dont l'objectif est à situer. Comment, en toute légalité et honnêteté intellectuelle, peut-on arriver à y participer quand des gens contribuent à discréditer l'élection? Nous avons déposé une requête au ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales pour trouver une issue à ce problème et on compte saisir le Président Bouteflika. A part ça, je vous dis sincèrement que je ne crains rien du tout.
Que comptez-vous donc faire pour mobiliser un électorat usé de promesses non tenues et déconnecté de la chose politique sachant qu'une abstention sans précédent plane sur ce scrutin présidentiel?
Si j'étais venu pour conquérir le pouvoir pour le pouvoir, je serais angoissé par cette question. Comme ce n'est pas le cas, je reste serein quant à l'attitude de l'électorat. Nous déplorons par contre le taux d'absentéisme qui concerne notamment certaines wilayas dont il est difficile d'en apprécier l'ampleur, faute de moyens.
Ma stratégie pour convaincre les électeurs c'est, comme je l'ai déjà souligné, de leur expliquer et clarifier la situation du pays et les objectifs de notre parti.
Les électeurs sont mobilisables et deviennent mobilisés en leur clarifiant la situation.
Le peuple veut de véritables explications et ma campagne (électorale) vise les grandes questions de l'heure, de l'université à l'agriculture.
On doit leur clarifier les choses et surtout apporter des solutions. Ça sera une réponse à ce que cherchent et attendent les Algériens.
Qu'attendent-ils selon vous?
Eh bien, disons-le, les Algériens veulent un vrai changement sur tous les plans.
Pour y parvenir, vous avez certainement adopté un projet de société qui est différent des autres. Peut-on connaître les grandes lignes de votre programme électoral?
Notre programme est dicté par notre propre vision des choses. Avant de l'adopter, je me suis posé deux questions: que veulent les Algériens en général et que veut cette génération montante, en particulier? Je suis arrivé à une conclusion en conséquence et j'ai tracé un programme basé sur la réforme du système éducatif, de l'université et sur l'encouragement de la recherche scientifique, condition sine qua non à l'épanouissement de la société. Des assises d'une industrie moderne, moins coûteuse, moins polluante et génératrice d'emplois font également partie de notre programme. Y figure également, la consolidation des équilibres de sécurité. Sur le plan institutionnel, notre programme vise la refondation du pays sur la base d'institutions républicaines, démocratiques et légitimes. Le Parlement, le Conseil constitutionnel...deviennent de véritables institutions dotées du pouvoir leur permettant de jouer leur rôle de surveillance, notamment de l'exercice du pouvoir exécutif. Notre programme qui va devenir action, si nous accédons à El Mouradia, déclare la guerre à trois menaces sur la nation: la pauvreté, le chômage ainsi que tous les fléaux de notre société (corruption, népotisme, ethnisation de la société...).
Pour conclure?
Je souhaite que cette élection apporte un espoir au pays. J'espère aussi que les dirigeants faciliteront la tâche à tous les candidats sans discrimination et que notre faux et ridicule problème de formulaires soit résolu une fois pour toutes.
Je souhaite le succès à la vaillante équipe rédactionnelle de votre journal que nous remercions beaucoup.


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