Ce commerce assassin a un coût: plus de 4000 Algériens ont été tués, des dizaines de milliers de blessés et autant d'orphelins et de handicapés. Quel est ce responsable politique, ce ministre ou ce député, qui osera s'attaquer au diktat de la contrefaçon? Personne pour l'instant, à croire même qu'ils sont aveugles devant un phénomène qui fait perdre à «l'Algérie 30 milliards de dinars chaque année». Plus grave encore quand ce phénomène touche la pièce de rechange automobile. S'exprimant au cours d'une conférence de presse qu'il a animée hier à Alger, le porte-parole de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (Ugcaa), M.Hadj Tahar, a indiqué que «50% des pièces de rechange et qui sont à l'origine d'un quart des accidents de la route, sont contrefaites». Dans un pays où le parc automobile est estimé à près de cinq millions de véhicules, il s'agit tout simplement de population en danger. Le résultat de ce meurtrier trafic ne se fait pas attendre. Plus de 4000 Algériens meurent chaque année dans des accidents de la circulation, des dizaines de milliers de blessés, autant d'orphelins et de handicapés, sans compter les énormes coûts médicaux et sociaux. Le porte-parole de l'Ugca a également indiqué qu'«un tiers des produits circulant sur le marché national est contrefait». Plus explicite, le conférencier a relevé que «60% des cigarettes mises à la vente dans notre pays, sont contrefaites». Puis les cosmétiques avec 40%, les vêtements et chaussures 30% et l'électroménager 12%. Pour étayer ses propos, l'orateur a tenu à préciser que ces chiffres proviennent des bureaux régionaux des commerçants répartis à travers le territoire national. Et de poursuivre: «Même le sel et la levure sont contrefaits. Ces produits sont fabriqués dans des usines clandestines, selon des informations émanant de la wilaya de Biskra.» Raison pour laquelle, «il faut impliquer le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière dans cette opération de lutte contre la contrefaçon», a-t-il suggéré. Prenant part au débat, le chargé de l'organique au niveau de la wilaya d'Alger, Abdennour Zaber, a interpellé le ministère du Commerce pour «organiser des séminaires et des campagnes de sensibilisation sur le fléau de la contrefaçon». Il soulignera que, «pour reconnaître un produit authentique, il faut que ce dernier porte une étiquette écrite en arabe, sinon il est contrefait». L'intervenant insiste toujours sur le certificat d'origine du produit. «C'est ce document qui validera l'authenticité et la fiabilité du produit», a-t-il précisé. De son côté, M.Hadj Tahar a avancé le chiffre de 4 millions de produits contrefaits saisis par les Douanes algériennes en 2008. «Sans compter les produits non saisis», poursuit-il. Le porte-parole de l'Ugcaa a dénoncé, au passage, l'importation informelle. «Celle-ci est à l'origine de l'ampleur de la contrefaçon en Algérie», a-t-il enchaîné. A ce propos, il a indiqué que «les Douanes algériennes ont saisi à fin 2008, 25.000 tonnes de chaussures en provenance de Chine dont 50% sont contrefaites». «C'est la contrefaçon et le marché informel qui entravent l'investissement étranger en Algérie. Comment voulez-vous que les étrangers investissent dans notre pays alors que nous n'avons toujours pas pu balayer ce fléau de notre marché», a-t-il martelé. Dans cette optique, le conférencier s'est rattrapé pour expliquer que le fléau de la contrefaçon affecte l'économie mondiale. Sur sa lancée, il a relevé que «8% des produits qui circulent sur le marché mondial sont contrefaits, ils sont estimés à 5 milliards d'euros.» Au chapitre de la contrefaçon intellectuelle, l'intervenant avance des données chiffrées: «L'Office national des droits d'auteur (Onda) a enregistré 423 procès en rapport avec ce dossier, l'année écoulée. Ainsi, on a saisi 134.000 CD et 10.000 cassettes, notamment à Alger, Sétif, Oran et Tlemcen». Quant aux faux billets, M.Hadj Tahar a rappelé qu'«ils sont en forte circulation dans les marchés de gros, de bétail ainsi que de l'automobile. Ils sont encore plus fréquents dans les marchés nocturnes comme le marché D15 à El Harrach (Alger)». Le représentant des commerçants et artisans algériens a souligné que les billets les plus contrefaits sont ceux de 1000DA, 500DA et de l'euro. Sur ce registre, l'orateur a révélé que «près de 200 personnes ont été inculpées en 2008, uniquement pour faux et usage de faux». Pour endiguer ce phénomène, le conférencier propose la constitution de brigades spécialisées dans la lutte contre la contrefaçon au niveau de la Sûreté nationale.