Le public est convié aussi à une soirée avec un film tchèque, à partir de 18h, Le bonheur de Bohdan Slama, tout un programme... Les journées du film européen étrennées par un film portugais Alice, le 03 février dernier, se poursuivent à la salle Ibn Zeydoun. Après des films espagnols, hollandais, suédois et hongrois, vendredi, le public cinéphile était convié à d'autres projections de films tout aussi passionnants. Le premier, roumain de Nae Caranfil est un drame intitulé Philanthropique. C'est l'histoire de Ovidu, petit professeur de littérature à Bucarest, sans grands revenus, vieux garçon, qui vit encore chez ses parents, tout en rêvant devant sa machine à écrire de devenir un grand écrivain. Malgré son salaire, c'est son vieux père, retraité, qui continue à subvenir à ses besoins. Ovidu s'endette à mort pour les beaux yeux d'un mannequin qu'il croit être la soeur d'un de ses élèves, voyou. Afin de continuer à financer les extravagances de sa belle, il tombe entre les mains de Pepe, un inquiètant mafioso, d'un style nouveau, qui s'est enrichi en mettant sur pied un lucratif réseau de mendicité déguisée. Il invente des «histoires» à ces soi-disant mendiants pour émouvoir la population qui donnera plus d'argent, qui ira directement dans sa poche. Sa grande combine, faire de Ovidu et de sa secrétaire, une ancienne prostituée, un couple modèle qui part à chaque fois dans un restaurant fêter leurs dix ans de mariage. Deux heures à manger jusqu'au moment fatidique où ils se rendent compte qu'ils n'ont pas assez d'argent pour payer la note. De scandale en esclaffe, c'est toujours un richissime personnage, parmi les clients, qui finit par payer l'addition en y rajoutant un peu plus pour le couple infortuné. De combine en combine, le soi-disant mari se fait tabasser sous l'oeil complice de sa présumée épouse et ils se retrouvent tous les deux dans une émission télé en train de se plaindre de leur mal-vie. Un compte en banque est ouvert par Pepe que le public, touché par leur histoire, ne tardera par à alimenter et largement...En dépit de son côté comique ou absurde pour certaines scènes qui nous rappellent un autre et non moins truculent et hilarant personnage, Roberto Benini, ce film dévoile la face cachée de la Roumanie où, comme en Algérie, le passage à l ‘économie de marché a laissé des séquelles. Résultat: des riches d'un côté et un peuple de plus en plus appauvri, de l'autre. En sus, des corrompus à tous les étages et des jeunes délinquants, oisifs et drogués qui finissent dans la rue. La ruse et le mensonge deviennent le seul remède pour sauver sa dignité. Le second film projeté au public venu plus nombreux, est un long métrage français, le dernier de Cédric Clapich (Poupées russes, Auberges espagnoles etc.) Il s'agit de Paris (le seul film projeté en 35 mm)avec une belle brochette de comédiens et, notamment son acteur fétiche Romain Duris. Ce dernier, danseur dans une revue, est déclaré malade du coeur et n'a pas beaucoup de temps à vivre. Son état de santé lui donne un regard neuf et différent sur tous les gens qu'il croise. Le fait d'envisager la mort met soudainement en valeur la vie, la vie des autres et celle de la ville toute entière. A commencer par celle de sa soeur, campée par la formidable Juliette Binoche qui joue le rôle d'une assistante sociale de 40 ans avec trois enfants et n'a pas le temps de s'occuper d'elle-même, ni de s'octroyer quelques petits moments de bonheur dans la vie car, pense-t-elle, sa vie est finie. Mais grâce à son frère, sa vision va changer. Autour d'eux, gravitent aussi d'autres personnages que rien ne lie forcément, sauf peut-être le fait que chacun se distingue par ses propres problèmes, graves ou pas, des individualités en somme qui tentent tant bien que mal d' exister dans ce Paris du XXIe siècle. Un Paris qui se veut moderne mais parfois nostalgique, heureux mais un tantinet pleurnichard, bosseur et noceur le soir. C'est selon. Fabrice Luchini est tout simplement fidèle à sa démesure, dans toutes les actions complexées, exubérantes et exacerbées auxquelles il s'adonne. Touchant aussi à sa sensibilité d'homme névrosé qui refuse de finir comme son ancien professeur d'histoire, décrépi et dépassé. Il a cette chance de se retaper une jeunesse ou de se rattraper en animant une émission télé justement sur la splendeur de l'histoire de Paris. Son côté fleur bleue le fait tomber amoureux d'une de ses étudiantes de la fac où il enseigne. jusqu'à que la réalité le rattrape...Paris des grands salons ou des petits cafés et bars, c'est aussi celui des petites gens, celui des maraîchers, d'une boulangère, d'un SDF, d'un clandestin camerounais...la vie peut être belle ou dure à Paris. Paris, ville froide, des sans-abri, du luxe et de l'amour. En somme des paradoxes. On saura gré ou pas d'ailleurs au réalisateur de ne pas avoir montré, pour une fois, la face cliché des banlieues. Mais sans doute là n'était pas la question. Autres comédiens qui crèvent l'écran, on citera Albert Dupontel, François Cluzet, Karin Viard, Gilles Lellouche, Mélanie Laurent...sans doute que Clapich a choisi de ne pas prendre un seul personnage principal mais plutôt un aréopage de figures principales avec autant de personnalités et de trames psychologiques, excellemment rendues par la musique. «Quand je me suis dit que j'allais appeler le film Paris, j'ai eu conscience qu'il fallait ressembler à la ville, c'est-à-dire alterner le banal et le monumental...Montrer la réalité neutre de certaines rues, mais aussi le côté grandiose et spectaculaire de certains lieux ou monuments. Pour les acteurs, finalement, c'est un peu la même chose. Il fallait des gens anonymes et des monuments du cinéma. En travaillant avec tous ces comédiens, on n'est pas dans le banal, on est dans l'exceptionnel, dans le grandiose», explique le réalisateur. Mélange, diversité et éclatement définissent finalement ce long métrage, dont beaucoup de plans-séquences sont tournés vers l'extérieur. Ce côté «cour», côté «fenêtre», c'est un peu la marque de fabrique du réalisateur L'idée même du film, c'est montrer Paris, et en croisant plusieurs gens, saisis, peut-être quelquefois à la dérobée mais avec autant de gravité dans le regard que de sensualité ou de mélancolie dans l'attitude. Paris d'hier et d'aujourd'hui, Paris, beau et rebelle, Paris à la fois courageux et rêveur, Paris l'éternel amoureux...Ce film, tout public, d'une durée de 2h10 est projeté, depuis hier, à la salle Mohamed-Zinet (13h, 15h00, 18h00). Ce film, expliquera Vincent Garrigues, attaché culturel auprès de l'ambassade de France, constitue autant de passerelles avec le public algérien, a fortiori, suite à l'Accord de coopération et de coproduction signé cette année entre l'Algérie et la France. Une action qui s'inscrit dans la continuité de l'engagement culturel de cet accord, dans un contexte fort, celui du grand événement que notre pays compte aussi abriter prochainement, celui du deuxième Festival culturel panafricain..