Bon an, mal an, les islamistes continuent à constituer la toile de fond de la politique en Algérie. Les membres de la direction de l'ex-FIS ont démenti, hier, toute idée d'un congrès de l'ex-FIS à l'étranger, que tenterait d'imposer le groupe de Mourad Dehina. Pour les «leaders d'Alger», la poussée médiatique selon laquelle un congrès réunirait prochainement, dans une capitale européenne, la direction du parti à l'étranger ainsi que des délégués de toutes les wilayas du pays, serait une idée de certains responsables de l'ex-FIS à l'étranger (le groupe Dehina, Zaoui, Anas, Kherbane, etc), «et qui n'aurait aucune chance d'aboutir, car irréaliste et irréalisable». La direction - ou ce qu'il en reste - de l'ex-FIS à Alger (le groupe Djeddi, Guemazi, Boukhamkham et Chigara), qui tire sa «légitimité» de son appartenance à l'équipe de Djenane El-Mefti, et de l'appui des deux chouyoukh, pensent, sous cape, que les promoteurs de ce congrès «trouveront matière à se propulser sur le devant de la scène islamiste». Cela s'ajoute au fait qu'aucune capitale européenne ne voudrait abriter pareille réunion dans un contexte marqué par une chasse aux islamistes qui a trouvé ses justifications au lendemain des attentats du 11 septembre 2001. Le véritable enjeu, en fait, se joue entre deux clans: il y a ceux qui pensent que la direction de l'intérieur du pays n'a pas les coudées franches pour agir et ceux, en face, qui pensent que les promoteurs du congrès font du forcing pour les éliminer. Au groupe de la direction d'Alger, il faudrait ajouter l'appui essentiel de Rabah Kebir et d'Ould Adda. Ce groupe, qui a soutenu à bras-le-corps, la concorde civile et la trêve de l'AIS se place de fait comme le seul et unique front interlocuteur du pouvoir (par le biais de ses chefs de l'AIS), s'étant inscrit «dans un cadre de dialogue avec les autorités depuis de longs mois déjà». Ce même groupe a, par ailleurs, démenti les informations qui ont circulé au courant de la semaine dernière, et qui ont fait état d'une «réunion secrète», à Bab El-Oued, des membres de l'ex-majliss echoura du parti dissous. «Ceux qui tentent, par des informations de ce genre, de nous (re) mettre sous les feux de l'actualité ne sont pas, loin s'en faut, guidés par le seul souci d'information, mais bien par quelque clan éradicateur qui continue à s'agiter à chaque occasion.» Longtemps séparés par de profondes divergences, il est vrai que les ex-leaders du parti dissous se rencontraient, il y a plus d'un mois, à Alger, et ont pu aplanir les différends qui les opposaient. Mais, aucune stratégie n'a été dégagée et les choses en sont restées là. En l'absence de toute initiative politique, ce sont plutôt les «militaires» qui bénéficient des égards des autorités. Les chefs de l'AIS ont été consultés, à maintes reprises et de façon informelle, avant les élections législatives du 30 mai. Les garanties, que ceux-ci auraient données, et l'effacement qui a caractérisé le mouvement de la nébuleuse islamiste, notamment les repentis, avaient préfiguré, selon certains, le poids réel et imposant qu'auraient pris les «militaires» sur les politiques. La recrudescence de la violence en Algérie, depuis le début de l'année, remet sur le tapis la question de la prise en charge des islamistes de base, les repentis ou autres, qui peuvent constituer, à tout moment, matière à souci, ou, au contraire, un élément d'apaisement. Les orientations politico-sécuritaires, encore flottantes, n'ont pas fait pencher la balance vers l'une ou l'autre des deux options.