Au fil du temps, les acteurs et les témoins s'effacent mais la date demeure et la jeunesse maintient le flambeau. Boumerdès a été au rendez-vous avec l'Histoire à l'occasion du 47e anniversaire du cessez-le-feu de la guerre de Libération. Lors d'une cérémonie organisée en son honneur, le moudjahid Yacef Saâdi a indiqué que «l'idée du film-référence La bataille d'Alger est née dans les geôles de l'administration coloniale». Retracant la genèse de ce film qui met en valeur le combat héroïque de la Résistance algérienne face à l'armée coloniale, le moudjahid, colonel à la Zone autonome historique durant la guerre de Libération nationale, a indiqué que l'idée du film lui était venue en prison, ayant été condamné par l'administration coloniale à la peine capitale à plusieurs reprises. Isolé, sans contact avec l'extérieur, dans une petite cellule de Serkadji (Alger), M.Saâdi a précisé que «pour occuper ses longues journées de prison «il mémorisait» tous les actes héroïques réalisés avec les combattants de l'Armée de libération nationale (ALN) dans la Casbah». «Cette mémorisation des faits héroïques était une première étape dans la conception du film dont le scénario ne pouvait pas encore être écrit du fait qu'en prison, il n'avait à sa disposition ni stylo ni papier, ces outils lui étant interdits à l'époque», a t-il ajouté. Après une mesure de grâce touchant de nombreux condamnés à mort, le moudjahid Saâdi fut transféré, en compagnie de plusieurs autres de ses compagnons, vers la prison d'El Harrach où il établit un système secret d'échanges d'informations avec les dirigeants du FLN-ALN. En raison de la constance de ses positions anticoloniales et sa fidélité à la Révolution algérienne, il fut transféré une nouvelle fois, avec d'autres prisonniers, vers une autre prison, mais en France. C'est dans ces nouvelles geôles que Yacef Saâdi put alors coucher sur papier ses souvenirs remontant à 1948, alors qu'il était «commerçant, avant de rejoindre l'action armée et les opérations commando (Fidayine) dans la Casbah». Il fut arrêté en 1957. C'est en 1962 qu'il acheva l'écriture du scénario d'un film auquel il donna le titre «Souvenir de la bataille d'Alger». Affinant le scénario, il s'est alors déplacé en Italie, ce pays étant à l'époque la plate-forme centrale «du cinéma dit du vécu ou réaliste». «C'est grâce à une intervention de l'ambassadeur d'Algérie en Italie que je fus mis en contact avec le réalisateur Gillo Pontecorvo, avant de nous mettre d'accord avec le scénariste Franco Salamosse sur la réécriture de mon synopsis», a-t-il poursuivi. Quant au choix de jouer son propre rôle dans le film, M.Saâdi a indiqué que «cela a été décidé après plusieurs discussions avec le réalisateur qui me convainquit que c'était mieux pour moi de tenir ce rôle». Il a ajouté «avoir accepté le rôle par respect de la valeur et de la réalité historique du film, auquel il contribua, notamment dans la reconstitution fidèle des lieux historiques». Le souvenir de l'événement demeure particulièrement vivant dans la mémoire de notre peuple. Depuis bientôt un demi-siècle, chaque année, à cette date, les Algériens se réunissent devant les monuments aux morts de nos communes pour retrouver, l'espace d'un moment, le sentiment du temps où, pour tous, la nation et la patrie étaient étroitement confondues. Au fil du temps, les acteurs et les témoins s'effacent, mais la date demeure et la jeunesse maintient le flambeau du souvenir pour que l'espérance, qui naquit ce jour, témoigne de l'espérance qui doit animer les générations nouvelles.