Avec la prise de fonctions à Tel-Aviv d'un gouvernement de droit dirigé par le leader du Likoud, les chances d'aller plus avant dans la recherche de la paix semblent compromises. Le prochain Premier ministre israélien de droite Benjamin Netanyahu tentera d'apaiser Washington en se disant prêt à régler le conflit au Proche-Orient, mais sans y oeuvrer réellement, estiment des experts. M.Netanyahu, chef du parti Likoud, dont le gouvernement devrait être présenté hier à l'investiture du Parlement, n'a guère montré d'enthousiasme jusqu'à présent pour la création d'un Etat palestinien aux côtés d'Israël. Reste que même les négociations menées avec les Palestiniens par ses prédécesseurs centristes du parti Kadima d'Ehud Olmert, officiellement favorable à un tel Etat, n'ont mené nulle part. «Il ne se passera rien. Netanyahu n'a pas l'intention de poursuivre les négociations à partir du point où elles avaient abouti avec le gouvernement d'Ehud Olmert», affirme le politologue israélien Akiva Eldar. M.Olmert s'est prononcé pour la solution de deux Etats coexistant pacifiquement, mais n'a pas réalisé de progrès notables durant plus de vingt rencontres avec le président palestinien Mahmud Abbas. Pour sa part, M.Netanyahu propose en priorité des mesures susceptibles d'améliorer les conditions économiques en Cisjordanie occupée, plutôt que de chercher d'emblée à négocier un accord de paix avec l'Autorité palestinienne. «Je pense que les Palestiniens devraient comprendre qu'ils ont avec mon gouvernement un partenaire pour la paix, la sécurité et le développement rapide de leur économie», a-t-il assuré. En refusant d'appuyer la création d'un Etat palestinien aux côtés d'Israël, M.Netanyahu a ravivé la crainte d'une aggravation du conflit tant avec les Palestiniens que sur la scène internationale. «Le nouveau cabinet israélien veut très clairement encourager la colonisation, la multiplication des barrages routiers (en Cisjordanie), et mettre définitivement fin aux efforts en vue de l'avènement d'un Etat palestinien», déclare Samir Awad, professeur de sciences politiques à l'université palestinienne de Bir Zeït en Cisjordanie. Pour Shlomo Avineri, son confrère israélien de l'université hébraïque de Jérusalem, M.Netanyahu fera cependant l'impossible pour éviter une confrontation avec l'administration du président américain Barack Obama qui entend relancer le processus de paix. «Il n'a pas dit les mots magiques "deux Etats pour deux peuples", mais je crois que, sans l'annoncer, il fera en sorte que la construction de (nouvelles) colonies cesse de facto», dit-il. Epaulé par le Parti travailliste du ministre de la Défense Ehud Barak, le gouvernement peut d'ailleurs difficilement se laisser entraîner par ses alliés naturels de la mouvance d'extrême droite. Selon M.Avineri, la nouvelle administration américaine peut changer de ton, mais pas d'attitude (...) Après tout, c'est George W.Bush qui a pour la première fois évoqué la vision de «deux Etats pour deux peuples». Or, sur le fond, les problèmes divisant Israël et les Palestiniens sont les mêmes: le tracé des frontières, le partage de l'eau, le statut de Jérusalem, les réfugiés palestiniens. La prise de contrôle de la bande de Ghaza par le Hamas a même ajouté une nouvelle dimension au conflit. Les Palestiniens ont de leur côté averti qu'ils ne discuteraient pas avec un gouvernement israélien qui refuse à la fois la solution à deux Etats et de geler la colonisation juive dans les territoires occupés. «Le processus de paix est en sursis», a affirmé samedi dans un article publié par le Washington Post le négociateur palestinien Saeb Erakat. «Sa crédibilité est en jeu et il ne survivra pas à l'échec d'une nouvelle série de négociations - pas plus que la solution à deux Etats.»