Avant-hier, la ville a été le théâtre d'une tentative de suicide collectif d'une vingtaine d'agents de sécurité. Les événements de ces dernières semaines rapportés par la presse sur les contestations dans différentes régions du pays appellent à la réflexion. Un autre mode opératoire de revendication est-il en train de voir le jour? Pas plus loin qu'avant-hier, la ville de Tizi Ouzou a été le théâtre d'une tentative de suicide collectif d'une vingtaine d'agents de sécurité. Ils menaçaient de passer à l'acte s'ils n'obtenaient pas le droit d'être rétablis dans leurs postes d'emploi. Notre édition du 9 mai rapportait dans ses colonnes la tentative de suicide d'une jeune femme devant la cour criminelle de Annaba. Déçue par le verdict prononcé contre ses violeurs, elle se jettera sous un véhicule en marche. Elle a eu, certes, la vie sauve mais a subi des fractures au niveau de la hanche. Le même jour, c'est un autre père de famille qui menacera de se jeter du toit d'un immeuble avec son enfant dans la ville de Tizi-Ouzou. A l'origine de son acte désespéré, une poursuite en justice contre lui pour avoir déchiré un registre des naissances à la mairie de la même ville. Il a fallu le déplacement en personne du procureur, qui réussira à le convaincre de renoncer à son action. Cette même semaine, une dame a entamé une grève de la faim au péril de sa vie car étant diabétique et sans assistance médicale dans la ville de Tizi Ouzou. Après avoir constaté que toutes les portes lui sont fermées pour un droit qu'elle estime être le sien, elle décidera de mettre ses jours en danger pour attirer l'attention des responsables. Ce ne sont toutefois là que quelques cas rapportés par la presse. Mais combien sont-ils ceux qui n'ont pas paru dans les colonnes des journaux? Ce n'est vraisemblablement que la partie émergée de l'iceberg. Sans faire référence aux explications psychologiques inaccessibles pour le commun des mortels, il est un phénomène que les spécialistes n'ont pas pu élucider: les harraga. Un témoignage poignant nous est parvenu d'un père de trois enfants tous partis par ce mode suicidaire. Menacés par le passeur qui voyait son embarcation en danger de surpoids, il se débarrassera, par menaçe d'une arme, de quelques-uns. Deux de ses fils se jetteront volontairement à la mer pour donner la chance à leur frère de continuer le voyage et subvenir aux besoins de la famille. Mais en fait de mode de revendication et de contestation dans toutes les régions du pays, le blocage des routes et la fermeture des sièges de mairie sont légion. Rien que dans la wilaya de Tizi Ouzou et durant toute l'année écoulée plus d'une centaine d'actions du genre ont été enregistrées. Il est indéniable que le passage à ce genre d'actes signifie la fermeture de tous les canaux de communication entre les élus, les responsables locaux et les citoyens. Cependant, le blocage des routes, les fermetures des sièges des administrations, les grèves illimitées et autres ne sont vraisemblablement pas des actes ultimes. Les tentatives de suicide qui se généralisent ne sont que le résultat de la récurrence et de la banalisation des premières. Autrement dit, les problèmes n'ont jamais contraint à des actions d'autodestruction. Les citoyens ne demandent qu'une oreille attentive.