L'impératif est d'encourager l'écriture honnête de l'histoire. Le 19 Mai 1956, «les fleurons de l'Algérie» répondent à l'appel du Front de libération nationale. Taleb Abderrahmane, Amara Rachid, Salah Laouanchi, Ahmed Taleb-Ibrahimi et des milliers d'autres «hautes consciences nationales» en devenir quittent les bancs des universités et des lycées pour se consacrer, entièrement, à la cause nationale. Leur génie politique se traduit par la création de l'Union générale des étudiants musulmans algériens (Ugema). Ce cadre leur offrira les conditions organiques idoines pour mener une action politique d'envergure nationale et de portée historique. La grève des étudiants marquera le début d'une épopée jalonnée de sacrifices incommensurables. Il y a 53 ans, jour pour jour, les étudiants et lycéens algériens avaient mis le colonialisme français en demeure de reconnaître l'existence d'une nation algérienne qui se battait pour son indépendance. «Avec un diplôme, nous ne ferons pas de meilleurs cadavres», tel a été le slogan du débrayage pacifique, synonyme de démonstration que la lutte armée a été le dernier recours de tout un peuple face à l'obstination du pouvoir colonial à s'attacher à l'illusion de «L'Algérie française». Cela dit, aujourd'hui, que reste-t-il de ces traditions de lutte? Cette question appelle l'établissement d'un diagnostic objectif de la situation actuelle de l'Université algérienne. Mustapha Lacheraf est étudiant en première année de l'Institut de journalisme, «Lacheraf», les mots ont des résonances...Bref, Mustapha avoue: «J'ai une idée confuse de l'événement historique qui a donné naissance à la Journée nationale de l'étudiant». Décidément, les liens familiaux avec le célèbre sociologue, journaliste et militant de la cause nationale, Mustapha Lacheraf, semblent ne pas avoir épargné l'étudiant de la déchéance du système éducatif et de l'université algériens. De l'avis d'analystes avertis, cela s'est traduit par l'incapacité de passer de «la vérité émotionnelle» à «la vérité» historique», comme préconisé par l'historien Benjamin Stora. Le travail a été entamé par d'éminents historiens tels que le regretté professeur Mahfoud Kaddache, Mohamed Harbi, Gilbert Meyner et autres. Cependant, le chemin est long et parsemé d'embûches idéologiques et de velléités révisionnistes foncièrement dangereuses pour l'avenir des nations algérienne et française. Le mal est grand et perceptible dans les propos de Boumahdi S. également étudiante en journalisme. En effet, cette jeune fille timide pense que «les autorités doivent encourager les travaux de recherche pour permettre au peuple de se réapproprier son Histoire pour comprendre son présent et se projeter dans l'avenir». Cela dit, l'absence de la notion de combat politique pacifique est-elle, pour autant, vérifiée? Mohamed Soni ne le pense pas. En effet, cet étudiant, major de promotion de sciences politiques estime que «la conscience politiques de l'étudiant algérien actuel est mise en veilleuse à cause de l'ampleur de la crise sociale». Pour ce futur cadre du pays, «les conditions dans lesquelles se trouvaient les étudiants algériens durant l'époque coloniale ont aiguisé en eux le sentiment d'appartenance à une seule nation. De ce fait, le combat national s'est enchevêtré avec la lutte existentielle que menait chaque individu au sein du groupe social». Même son de cloche chez son ami Zerrouga Ismaïl, major de promotion en sciences politiques option relations internationales. Seulement, ce dernier a précisé: «Dès lors, la question de la survie de toute une nation a donné sa substance au combat politique qui traduit la valeur de la Liberté en un objectif politique lisible et visible, l'indépendance de l'Algérie.» Ainsi est mise en évidence l'existence d'une nation représentée alors, par un gouvernement légitime, en l'occurrence le Gpra. Ce gouvernement a eu pour fonction de poser les jalons de la Souveraineté nationale. Nombre d'artisans de la grève des étudiants et lycéens du 19 mai 1956 restent méconnus. Parmi eu figurent Taleb Abderrahmane et Amara Rachid. Concernant Taleb Abderrahmane, cette figure de proue de la cause nationale est née le 3 mars 1930 à la Casbah. Doté d'une intelligence hors pair, il ouvre droit à une bourse à l'étranger. Cependant, l'enfant prodige refuse. Plus que cela, il décide de rejoindre le maquis à Azeffoun dans la Wilaya III historique. En compagnie de Rachid Kaouache, il crée un laboratoire de fabrication de bombes qui ont servi dans la Bataille d'Alger. Suite à la grève des étudiants à laquelle il a activement participé, Taleb Abderrahmane intensifie ses activités. Arrété le 5 juin 1957 à Blida, il fait preuve d'une bravoure que la torture coloniale n'a pu ébranler. Le valeureux combattant est condamné à mort puis exécuté le 24 avril 1958. Pour sa part, Amara Rachid est originaire de Bouadnane, commune d'Iboudrarène dans la wilaya de Tizi Ouzou. Sur les consignes de Mohamed Seddik BenYahia, Rachid est chargé d'organiser la grève du 19 mai 1956. Cerné dans un accrochage des plus meurtriers, Amara Rachid tombe au champ d'honneur le 14 juillet 1956. Gloire à nos martyrs et heureux ceux qui n'ont rien vu de la situation actuelle du pays, en général, et de l'université en particulier!.