Abou Legraâ surprend par des tableaux touchants où l'inattendu se mêle à l'énergie des danseurs talentueux. Le chorégraphe Sofiane Abou Legraâ était un peu déçu de ne pas voir grand monde lundi soir, à la salle El Mougar, où il a présenté pour la première fois en Algérie sa pièce chorégraphique, Allegoria Stanza, réalisée par sa compagnie Baraka, installée à Lyon (France). Celle-ci avait déjà, pour information, sillonné le monde en donnant près de 150 spectacles dans le monde. 10 danseurs sur scène vont être amenés à se confronter et se mouvoir sur le rythme de musiques aussi diverses qu'inattendues. Dans des costumes couleur orange, des danseurs de hip-hop se mêlent à des interprètes de danse contemporaine dans une fusion parfaite, où ils vont rendre «grâce» par des mouvements saccadés, souples, aériens, mécaniques, sensuels et denses, à la nature, à l'humanité...La pièce chorégraphique s'ouvre sur la voix de Faïrouz. L'Orient, dans un voyage improbable, imprévisible mais réussi, croise le Nord et s'amalgame avec harmonie en conjuguant ses secrets et nonchalance, au gré des pas alertes des danseurs pour donner à voir des tableaux majestueux, tout en hardiesse, grâce et émotion. La douceur s'arme de tempérament haut en couleur. Un écran géant est placé au milieu de la scène, duquel est passé en revue le temps et ses caprices. Les éléments de la nature vont se déchaîner, tumultueux pour s'apaiser en un fracas remarquable et remarqué, de vie et de poésie. D'abord la houle de la mer, se veut calme et revitalisante, baume des âmes tourmentées, mais arrive la tempête. La musique électronique cède le pas à l'orientale du Liban transformant les danseurs en quelque chose de robotique pour certains. La mer, qui scintille, devient bientôt rouge. Est-ce l'orage qui est passé par là? En tout cas, le tonnerre et les éclairs seront bien aux rendez-vous et éclateront en un multiple saut chaloupé qui jette un peu de tension parmi l'assistance. Mais vite survient l'accalmie, après un long phrasé plaintif «yalélé» et une bonne dose de parade de percussion à faire monter votre adrénaline. Un semblant de calme se ressent non sans avoir laissé sa trace de retenue évanescente, de force généreuse et de beauté désarmante. Allegoria Stanza a apporté beaucoup de fraîcheur malgré toute la chaleur des lampions, qui inondait la scène, le visage et les costumes des danseurs. «Se donner», serait l'allégorie même de la danse, confortée par cette belle allégorie de paix, quelque peu perceptible à travers ces tableaux abstraits et bien nouveaux, faut-il le reconnaître, pour l'oeil profane. La danse contemporaine, ignorée, est loin de faire école en Algérie, exception faite pour le hip-hop. Une belle leçon de danse en tout cas et Sofiane Abou Legraâ promet d'autres encore grâce à son projet de formation à la danse contemporaine en Algérie. Pour ce faire, il se donne au moins 10 ans pour y arriver, ceci afin d'assurer la pleine relance de la danse en Algérie. Avant cela, il reviendra les 26 et 27 de ce mois pour des auditions de danse en vue de recruter 20 danseurs algériens qui assureront le spectacle de clôture du 2e Festival culturel panafricain. Une occasion à saisir!