La diplomatie de Mohammed VI redouble en gesticulations. L'effet boomerang n'a pas mis des lustres pour produire ses effets. C'est un peu l'histoire de l'arroseur arrosé. Le député du Psoe, le Parti socialiste ouvrier espagnol, au pouvoir, doit se mordre les doigts après les propos qu'il a tenus la semaine dernière. Juan Callejon Baena qui était à la tête d'une délégation de la Chambre de commerce et d'industrie d'Alméria en visite à Lâayoune, capitale du Sahara occidental occupé, avait, dans sa déclaration à la presse, mis l'accent sur «le climat de sécurité et de stabilité qui, selon lui prévaut au Sahara ainsi que le développement réalisé en matière d'infrastructures de base de la région», s'est empressée de rapporter dans sa dépêche l'agence de presse officielle marocaine MAP. Et comme pour enfoncer le clou il avait ajouté: «En s'appuyant sur le projet d'autonomie proposé par le Maroc, il est possible d'aboutir à une solution.» Si cette sortie médiatique en faveur de la proposition marocaine, qui de surcroît provenait de l'ancienne puissance colonisatrice du Sahara occidental, fut accueillie ainsi qu'on le devine comme un solide appui aux thèses défendues par Rabat, il n'en fut guère de même du côté de la capitale espagnole où de nombreuses voix progressistes et non des moindres ont donné de la voix. Un tollé quasi général. La première salve fut l'oeuvre de l'UPD, l'Union progrès et démocratie qui a tiré à boulets rouges sur le Psoe au pouvoir: «L'UPD considère que le parti socialiste affiche une fois de plus une attitude hypocrite lorsqu'il se proclame comme étant l'ami du peuple sahraoui d'une part et soutient d'autre part la thèse de l'autonomie marocaine», avait souligné dans un communiqué, répercuté par l'APS, l'UPD auquel s'est associé le parti de la gauche unie, Izquierda Unida. Le numéro un du parti n'a pas manqué d'appeler la formation politique de Luis Zapatero au respect des résolutions adoptées par le Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies. Rosa Diez a demandé au gouvernement espagnol de «se joindre à la défense active et sans équivoque du droit du peuple sahraoui à un référendum d'autodétermination et à l'indépendance effective et à exiger le respect de la légalité internationale, conformément aux différentes résolutions des Nations unies». Le coup de grâce allait être assené il y a quarante-huit heures à peine. La Coordination espagnole des associations de solidarité avec le peuple sahraoui s'est montrée sans état d'âme avec le député du parti au pouvoir en Espagne qui a outrepassé ses prérogatives et s'est rallié au camp marocain au nom de projets économiques au goût fort juteux. «Nous exigeons sa démission et la remise de son mandat en tant que député pour non-respect des règles régissant la politique internationale de l'Etat espagnol concernant le litige opposant le peuple sahraoui au Maroc», indique le communiqué de la Ceas. La démarche du parlementaire espagnol semble cependant avoir d'autres adeptes si l'on en croit l'agence de presse officielle du Royaume alaouite qui rapporte dans ses colonnes qu'un groupe d'amitié parlementaire «italo-marocain» dénommé «Les amis du Maroc» composé de 111 membres, aurait affirmé jeudi dernier «apprécier positivement l'initiative marocaine pour la négociation d'un statut d'autonomie». Cela rappelle étrangement l'initiative de Fathallah Sijil-Massi. L'ex-ambassadeur du Maroc en France qui, à travers des courriers confidentiels adressés aux consuls généraux du Royaume, avait pressé ces derniers à rallier les députés et sénateurs français au projet d'autonomie marocain. En octobre 2007, le quotidien français Le Figaro écrivait à ce propos: «Mohammed VI avait envoyé ses missi dominici dans les pays membres du Conseil de sécurité. Paris, l'un des plus fidèles soutiens de Rabat sur ce délicat dossier, avait eu droit à la primeur du projet. Jacques Chirac avait personnellement reçu la délégation marocaine à l'Elysée...» L'on comprend pourquoi le conflit s'éternise depuis plus de 34 ans. En plus de ramener les Marocains à plus de raison, Chritopher Ross aura à gérer les pressions et les interférences des Occidentaux lors du 5e round de négociations qui s'annonce comme étant des plus délicats.