«Il existe un discours humanitaire qui accompagne le discours politique et économique français» qualifié de «très dangereux et pervers», a dit un cinéaste africain. La détermination de l'Algérie de s'inscrire dans la durée, avec une démarche constructive et pragmatique servant le cinéma de tous les pays d'Afrique, n'est pas un simple propos...puisqu'elle a pu joindre l'acte à la parole, et ce en se proposant d'accueillir les assises du cinéma africain à Alger en 2010. Au cours du colloque organisé dernièrement dans le cadre du Panaf, qui a vu sept panels plancher sur le sujet, les cinéastes, producteurs et professionnels du 7e art ont ainsi relevé leur «anxiété» et «angoisses» quant à l'avenir du cinéma africain, soutenant que «les films d'Afrique existent mais la volonté politique de pérenniser et de soutenir le cinéma en Afrique continue de faire défaut». Ils ont fait état de leur «anxiété à voir des aides sérieuses émerger, ainsi qu'une vraie politique culturelle se définir dans les pays d'Afrique ou dans l'Union africaine». A ce titre, lors de la dernière édition du Festival panafricain de Ouagadougou (Fespaco), les cinéastes africains ont été déçus lorsque des officiels français ont fait état de leur volonté de cesser les relations de soutien pour favoriser des rapports de partenariat, ce qui a fait dire à un cinéaste africain qu'«il existe un discours humanitaire qui accompagne le discours politique et économique français qualifié de "très dangereux et pervers", d'où, a-t-il fait observer, la nécessaire structuration des cinémas (industrie, aides, mais aussi festivals»). M.Ahmed Bedjaoui, critique de cinéma qui avait présidé les débats du colloque qualifié de «grand rassemblement» de cinéastes africains et de la diaspora, a indiqué qu'«il s'agit de la "volonté" de l'Etat algérien de contribuer au développement du cinéma africain en donnant une suite au colloque sous forme d'assises». Dans le même sillage, le président du colloque a cité la signature du protocole de coproduction avec l'Afrique du Sud et appelé ainsi à la multiplication des accords interafricains, sollicitant de ce fait les participants à faire des propositions concrètes en vue de préparer les assises du cinéma africain en 2010. Il a ainsi fait état des propositions des cinéastes et producteurs africains ayant pris part à ce colloque, lequel avait établi de manière objective et transparente l'état des lieux du cinéma africain. En ce sens, un cinéaste sénégalais, Mahama Johnson Traoré, a plaidé pour la création d'une fédération des producteurs africains lors des assises, alors que l'Egyptienne Jihan Al Tahri a appelé à la constitution d'un fonds d'aide africain, voire de l'Union africaine. Balufu Bakupa Kaniyinda du Burkina Faso a souligné pour sa part la nécessité pour ces assises de réunir les acteurs africains de la formation au même titre que Charles Mensah qui a demandé que ces assises servent à mobiliser les ministres en charge du cinéma sur leur nécessaire engagement au plan national et collectif. Lebone Maema a abondé dans le même sens, soulignant qu'il s'agissait de préparer les engagements en amont avec les Etats de façon que les assises permettent d'officialiser la signature d'une démarche commune. D'autres participants à ce colloque ont proposé que l'Algérie étudie la création de groupes de travail sur les questions d'un fonds de la formation et d'engagements prenant la suite du Sommet de Pretoria que les assises (qui pourraient ainsi devenir le 2e Sommet pour le cinéma africain) pourraient permettre d'entériner. Le commissaire général du Fespaco, Michel Ouedraogo, a appelé, de son côté, à la collaboration entre festivals d'Afrique (comme celui de Carthage) afin de permettre de renforcer leur portée, regrettant la faiblesse des financements (africains en particulier) puisque le Fespaco n'est soutenu que par le Burkina Faso, alors qu'il profite à l'Afrique entière. Cela dénote aussi la nécessité d'aller vers une coopération forte et d'échanges entre les pays du continent en matière de formation audiovisuelle notamment, ont ils soutenu.