Parmi les 290 dockers ayant observé une grève de 12 jours devant la direction générale de l'Entreprise portuaire d'Alger (Epal), 70 sont actuellement licenciés. Constituant le poumon du trafic maritime du pays, le port d'Alger «crève» depuis plusieurs semaines. La structure portuaire est sur le fil du rasoir. Dockers mécontents et travaillant au jeton, un statut d'entreprise obsolète, bateaux en rade, pertes astronomiques...et échanges d'insultes entre les arrimeurs et leurs supérieurs hiérarchiques, «noircissent» le climat qui règne au niveau du port. Ne dit-on pas «à bon chat, bon rat». L'un attaque, l'autre riposte. Pis encore, parmi les 290 dockers ayant observé une grève de 12 jours devant la direction générale de l'Entreprise portuaire d'Alger(Epal), figurent 70 actuellement licenciés. Contacté hier par téléphone, Laribi Azouz, un de ces dockers écartés, crie à une hogra sans limites. «On est écartés pour la simple raison qu'on n'a pas cédé à des pressions venant d'en haut, nous obligeant à exercer notre métier dans des conditions exécrables.» A haute voix, notre interlocuteur ajoute: «On n'a pas voulu faire preuve de tartufferie comme l'a fait une quarantaine de dockers ayant envoyé de pseudos certificats de maladie afin d'éviter un éventuel renvoi.» Cette «trahison collective», qui divise les rangs des arrimeurs, démontre qu'au port d'Alger l'organisation laisse à désirer. Seulement, après les journées de grève ayant causé 88 milliards de pertes, il a été décidé de réintégrer les 70 licenciés à partir du 23 du mois en cours. «On reprend le travail dans cette entreprise étrangère, et pour rejoindre l'entreprise mère(Epal), on doit passer par certaines formalités dont une demande manuscrite», explique M.Laribi. Cette reprise du travail sera certainement saluée d'autant plus que le mois de Ramadhan, réputé pour ses dépenses dispendieuses, approche à grands pas. Au port d'Alger, c'est également cette odeur nauséabonde qui se dégage quotidiennement des quais qui fait craindre le pire. Les premiers à en subir les conséquences, ce sont les dockers. Tout le monde se souvient de Rabah Merad décédé des suites d'un cancer. Apostrophé sur ces étrangers travaillant au port d'Alger au détriment des Algériens, Laribi Azouz répond: «Ils viennent du Pakistan, de l'Inde et de plusieurs pays du continent noir pour occuper des postes devant être pris par des Algériens.» Sans nommer son pays d'origine, M.Laribi affirme qu'un étranger occupant un poste de non-responsabilité touche un salaire de 70 millions. Cette structure portuaire a souffert depuis l'industrialisation de l'Algérie d'un encombrement suspect. En dépit des importations qui se multiplient, certaines entreprises ne se sont jamais pressées pour le déchargement de leurs marchandises. De telles pratiques ont mené l'ancien président de la République, Houari Boumediene, à prendre les décisions nécessaires. C'est suite à cette réaction du chef de l'Etat que des zones douanières hors-port ont été créées. Aujourd'hui, quoique ces zones soient de plus en plus nombreuses, le problème persiste. Autant de navires que de surestaries à payer à cause d'une mauvaise programmation d'arrivée, de passe-droits pour donner l'autorisation d'entrée au quai. Hier, ils étaient plus de 40 bateaux à être restés en rade. Chacun cause des pertes de 2500 dollars par jour. Quel est le manque à gagner résultant des surestaries générées par les navires en rade et leur séjour à quai? A cette question, Kamel Khakifa, consultant, avait affirmé: «Plus qu'un manque à gagner, les surestaries sont des pertes sèches endémiques, de surcroît en devises pour l'économie nationale depuis des décennies, constituant en partie un facteur d'appauvrissement de la collectivité nationale dans son ensemble.» Un vrai-casse tête chinois qui a compliqué la gestion de cette entreprise portuaire: entité stratégique, mais véritable nid de vipères. L'arrivée de Dubaï World Ports pour la gestion du terminal à conteneurs, si elle a fait grincer bien des dents et fait des mécontents, doit apporter les preuves du bon choix par une gestion autre que celle qui était en cours. Pour cela, casser d'abord les anciennes pratiques comme la tchipa devenue monnaie courante, les passe-droits...et le retour au travail selon le week-end universel. C'est un vaste programme de longue haleine pour peu que la volonté de bien-faire par tous les intervenants suive.