Le jour de l'Aïd, Béjaïa ressemblait à une ville morte. La métamorphose est telle que cela n'échappe à personne. Très peu de circulation. Les commerces fermés, les rues et boulevards vidés de leurs occupants offraient un spectacle de désolation. C'est devenu une coutume. Le jour de l'Aïd, toutes les activités sont paralysées. Les matinaux sont principalement ceux qui se rendent aux cimetières de la ville pour se recueillir sur les tombes de leurs proches. On y va à pied. Il n'y a point de bus. Les transporteurs ont fait la grasse matinée. Un décor qui traduit toute la tristesse de ce jour. En dépit des appels de l'Union des commerçants et de la direction des transports, aucune activité n'a été constatée, notamment le matin. Il ne faut surtout pas être un étranger à Béjaïa, car vous ne trouverez certainement ni moyen de locomotion ni lieu de restauration ouvert. «A chaque fois c'est la même rengaine», s'indigne un habitant. Comme lui, les habitants se plaignent de cette situation qui n'a de sens qu‘en l'absence du respect des lois de la République. Et pour cause! Les commerces et les moyens de transport ne sont-ils pas un service public pour le public? A Béjaïa cette notion a perdu tout son sens en ce jour de l'Aïd. Les gens l'ont vérifiée à leurs dépens. Il a fallu attendre le début de l'après-midi pour voir enfin les premiers bus circuler et les premiers commerces ouvrir. Ces derniers sont principalement des boulangeries et quelques cafés. Ceux qui n'ont pas eu le réflexe de s'approvisionner la veille de l'Aïd, l'ont bien regretté en ce dimanche de septembre. Quant aux étrangers, la galère a été bien sûr au rendez-vous. Devant un commerce, un étudiant africain a dû patienter de longues heures pour s'approvisionner en lait. «C'est ma première année en Algérie et ne connaissant pas les habitudes, je me suis pris en retard. Le résultat est là. Il est 11 heures je n'ai pas encore pris mon petit- déjeuner», a-t-il répondu à notre question. Comme lui, il devait y avoir des centaines à vivre le même calvaire. Mais ce qui a créé le plus de mécontentement, c'est l'absence de moyens de transport. Que ce soit vers les mosquées ou les cimetières, les habitants de la capitale des Hammadites ont dû recourir au «train onze». Interrogés sur cette situation, les commerçants estiment que c'est leur fête aussi. «J'ai jeûné comme tout le monde j'ai le même droit à l'Aïd comme tout le monde», soutient cet épicier de la rue de la Liberté. Un autre soulignera: «Il m'est arrivé d'ouvrir inutilement le jour de l'Aïd et depuis je ne le fais qu'en début d'après-midi.» Cette situation anormale doit en principe interpeller les pouvoirs publics pour agir dans le sens de l'animation d'une ville quel que soit le caractère de la journée. En attendant, les citoyens ont fait encore une fois appel à la débrouille.