Ahmadinejad accuse le ministre français des Affaires étrangères d'avoir contribué aux troubles qui ont émaillé la dernière élection présidentielle en Iran. Dans une interview diffusée mardi par la chaîne de télévision France2, le président de la République islamique d'Iran n'a pas épargné le chef de la diplomatie française et encore moins le chef de l'Etat français. «Nous regrettons l'action de ceux qui ont provoqué ces troubles. Posez donc la question à la chaîne de télévision La Voix de l'Amérique, la BBC, et au ministre français des Affaires étrangères qui ont incité les gens à se révolter», a déclaré le président iranien au journaliste qui le questionnait sur les manifestations populaires qui ont contesté sa réélection. Ahmadinejad n'a pas raté non plus le ministre français des Affaires étrangères au sujet de la jeune étudiante iranienne de 26 ans qui a trouvé la mort durant ces événements, et dont les images ont été relayées par les télévisions occidentales. Elle a été tuée d'une balle en pleine poitrine le samedi 20 juin à Téhéran. Sur la vidéo qui a été mise sur la Toile, on la voit s'effondrer au beau milieu de la foule. Elle a agonisé en l'espace de quelques secondes. Ces images ont fait d'elle un symbole de ce mouvement de contestation. Le chef de la diplomatie française a-t-il une responsabilité dans la mort de Neda Negha-Soltan? Le président iranien y répond sans sourciller: «Oui, il est responsable lui aussi.» Le président de la République islamique d'Iran avait demandé au chef du pouvoir judiciaire, l'ayatollah Mahmoud Hachémi Shahroudi, d'enquêter sur la mort de la jeune femme. Le 31 août 2009, Nicolas Sarkozy avait déclaré depuis Berlin: «Je voudrais dire combien nous sommes admiratifs du courage du peuple iranien. Je veux redire qu'il mérite mieux que les dirigeants actuels.» Le chef de l'Etat français répondait aux journalistes à propos de la réélection contestée de Mahmoud Ahmadinejad et de la situation politique qui prévalait en Iran. La réplique ne s'est pas fait attendre. «Malheureusement, la France, qui adopte des positions de plus en plus extrémistes, a décidé de s'ingérer dans les affaires intérieures de l'Iran, ce qui est totalement inacceptable», lui a répondu Hassan Ghashgavi, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères. Le président iranien a saisi l'occasion de cet entretien pour rendre la monnaie de sa pièce au président de la République française et sans prendre des gants. «Ce monsieur Sarkozy s'ingère dans les affaires intérieures de notre nation. Moi aussi j'ai un avis semblable. Je pense que le peuple français mérite mieux que ses dirigeants actuels. Pour moi, la colère de M.Sarkozy n'est pas recevable», a-t-il souligné. Les relations entre les deux pays, comme on peut le constater, ont atteint un niveau de détérioration qui risque de compliquer davantage le dossier nucléaire iranien ainsi que l'affaire Clotilde Reiss. On a pu remarquer le temps d'hésitation qu'a marqué le président iranien lorsque le journaliste qui l'interrogeait à ce sujet a voulu lui remettre une lettre du père de la jeune femme accusée d'espionnage, incarcérée le 1er juillet puis libérée sous caution et assignée à résidence depuis à l'ambassade de France. A propos de son éventuelle libération, Ahmadinejad a botté en touche. «Vous devez savoir qu'il y a quelques Iraniens qui sont en prison en France depuis des années. Ce sont des prisonniers qui eux aussi ont un père, une mère.» Selon le quotidien français Le Figaro, les autorités françaises seraient sur le point de renvoyer en Iran Ali Vakili Rad, accusé d'avoir assassiné l'ancien Premier ministre iranien Chapour Bakhtiar en 1991 à l'intérieur de sa résidence à Suresnes dans les Hauts-de-Seine. Condamné à une peine de prison de 18 ans, il pourrait faire l'objet d'une libération contre celle de Clotilde Reiss. Nicolas Sarkozy, qui participe au sommet du G20 à Pittsburgh aux Etats-Unis, n'a pas encore réagi à cette inattendue sortie médiatique du président iranien qui, plus est, s'est déroulée sur une chaîne de télévision publique française. Il est prévu qu'il intervienne aujourd'hui sur le même média sur les grands dossiers du moment. A moins que les journalistes ne soient assez audacieux pour élargir leur éventail de questions aux relations franco-iraniennes.