Pleine de verve, d'entrain et très en forme, sillonnant le pays de long en large et saluant la foule, Leïla Ben Ali est ovationnée par ses «fans» partout où elle passe. N'annonce-t-elle pas une destinée tunisienne au féminin? A trois jours de l'élection présidentielle en Tunisie, Mme Leïla Ben Ali, épouse du chef de l'Etat, imprime un certain tonus aux festivités politiques qui précèdent le jour J. Elle harangue, séduit et convainc son auditoire lors de ses apparitions fréquentes à la télévision, dans la presse et ses meetings populaires. Le choix de ses costumes, la manière de s'adresser aux citoyens rappellent étrangement l'actuelle secrétaire d'Etat américaine, si bien qu'à Tunis, nombreux sont ceux qui surnomment l'épouse du président, Mme Clinton d'Afrique du Nord. Voilà donc qui annonce une autre exception tunisienne. Car, dans le registre des exceptions, la Tunisie se distingue largement des autres pays de la région. C'est, en effet, le seul pays dans tout le monde arabe où l'armée n'a aucun rôle, absolument aucun, dans le champ politique. C'est l'un des rares pays à pouvoir se prémunir contre la vague de l'islamisme qui a gangrené la région. La lutte contre le terrorisme et l'extrémisme en Tunisie a impliqué les volets social, économique, idéologique et sécuritaire. C'est ainsi, qu'il y a eu l'émergence d'un Islam modéré qui met fin au dogmatisme et à l'ostracisme. Et enfin, la dernière particularité tient à l'approche adoptée par le Changement, en matière de promotion de la femme. Cette approche procède d'un principe immuable selon lequel le renforcement des droits de la femme est le meilleur garant et moyen d'immuniser la société. S'il y a bien un domaine qui fait l'unanimité dans la vie politique tunisienne, c'est bien le statut de la femme. Forte de cet avantage, l'épouse du président investit le terrain politique dans lequel elle veut davantage peser. Cela au moment où son mari, candidat à sa propre succession, se présente pour un dernier mandat de cinq ans. Pour les observateurs politiques tunisiens, on ne peut plus compter sans cette Dame à la posture offensive et à l'esprit combattant. Dans un meeting près de Tunis, la présidente du réseau Basma, entourée par plus de 5000 jeunes, a assisté dans une bonne ambiance à l'accostage au port de la Goulette d'un bateau baptisé «Fidèles à Ben Ali». A son bord, 400 jeunes invités pour une tournée de Bizerte dans le cadre des animations de la campagne. Une journée plus tard, elle prend un bain de foule à Carthage, près du Palais présidentiel et au milieu d'une foule exaltée, où elle a participé à un spectacle présenté par des handicapés, organisé par Basma. Au Palais des sports d'El Menzah près de Tunis, elle a enflammé les foules lors du grand meeting de soutien à la candidature de Ben Ali. La rencontre a rassemblé plusieurs milliers de femmes, mobilisées par les organisations et les associations du RCD. Signant un éditorial, cette semaine, dans le deuxième numéro de la revue La voix de la femme arabe, depuis la Tunisie (Voice of Arab woman from Tunisia), sous le titre «La participation de la femme arabe à l'oeuvre de développement: un pari civilisationnel», Mme Ben Ali a clairement laissé entendre qu'elle ne s'arrêtera pas en si bon chemin dans le combat politique. Elle a mis, à ce propos, l'accent sur l'intérêt croissant accordé par les instances régionales et internationales, au rôle de la femme dans la vie politique. Une nouvelle tendance mondiale et une opportunité que la première Dame de Tunisie met au profit de son pays. «Il suffit d'inciter le gouvernement et la communauté internationale à aplanir tous les obstacles qui entravent la dynamisation du rôle de la femme dans l'impulsion du processus de développement global, de manière à s'adapter aux mutations mondiales...», écrit-elle dans son éditorial en faisant remarquer que «les pays arabes ne peuvent pas être à l'abri de ces évolutions ni occulter l'impératif d'investir dans les ressources humaines dont la femme constitue l'une des composantes essentielles.» Pleine de verve, d'entrain et très en forme, sillonnant le pays de long en large et saluant la foule, Leïla Ben Ali est ovationnée par ses «fans» partout où elle passe. N'annonce-t-elle pas une destinée tunisienne au féminin?