«Je suis l'écrivaine du désir et non pas du plaisir comme j'aime à le répéter», nous a avoué l'auteure de La mémoire de la chair. Beaucoup de monde attendait jeudi après-midi du côté du stand Sédia au Sila. Et pour cause, la diva du roman arabe sait se faire désirer. Avec une demi-heure de retard, nous eûmes le temps de discuter un peu avec une des filles qui tiennent le stand. Celle-ci nous avouera que ce Salon est de loin le pire qu'elle a connu. «L'humidité, il l'ont réglée le deuxième jour en nous remettant un bac en plastique, voilà comment ils ont procédé. Car, il faut voir l'eau qui coule sur les livres, le soir venu. La Safex c'était nettement mieux», avouera notre interlocutrice. Tout le monde s'interroge sur le livre de Ahlem Mostaghanemi. Depuis quand écrit-elle en français? Le livre Dakirat El Djased vient, en effet, d'être traduit en langue française et publié aux éditions Sédia. La reine du roman arabe comme s'est plu à la considérer la ministre de la Culture, se plie difficilement à nos questions tant le public est venu nombreux à sa rencontre, nous sommes repartis pour la laisser seule avec lui pour pouvoir enfin lui dédicacer son livre. Après sa grande sortie médiatique au stand du ministère de la Culture, le phénomène Ahlem Mosteghanemi sort de son silence, elle qui refuse toute interview à la presse. Elle se permet donc cette petite incartade pour nous filer quelques mots «volés» à la hâte. «Je suis très heureuse d'être pour la première fois en contact avec mes lecteurs francophones. C'est ce qui me manquait. Beaucoup m'aiment sans avoir lu mes romans. Pour moi, la plus proche langue après l'arabe, est la langue française vu que je lis beaucoup aussi bien dans cette langue, même si je serai traduite en anglais ou en japonais», confie-t-elle en arabe, avant de s'aviser comme une sorte de prise de conscience et se met naturellement à parler français. Elle, qui préférait au départ nous parler dans la langue d'El Moutanabbi, esquisse sa confidence dans la langue de Molière. Une obligation de marketing sans doute. «J'espère que mes lecteurs francophones seront fiers de moi, car j'écris sur l'histoire de la guerre d'Algérie.» A propos de son écrit très sensuel, l'écrivaine fait remarquer: «Je n'ai cassé aucun tabou, il y a tout au plus un seul baiser dans mon roman. J'estime que j'ai plutôt embelli la langue arabe. J'écris comme je parle. Je parle d'amour, je suis l'écrivaine du désir et non du plaisir comme je l'ai toujours dit. Mais je ne le proclame pas comme un slogan... C'est avec le désir qu'on fait de la belle littérature.» Et d'ajouter: «Le titre de mon roman Mémoire de la chair n'est qu'un jeu de mots. J'aime jouer avec les mots vu que je suis écrivaine, mais je ne le fais pas pour vendre. Il y a d'autres qui choisissent des titres plus commerciaux. Ce n'est pas mon cas. Moi, j'ai choisi un titre qui ressemble à ce que j'aime, à mon langage.» Alors, Ahlem Mosteghanemi prête à séduire le public universel? «Je vous jure que ce qui m'intéresse est le public algérien, rien que ça. Je m'en fous complètement de la traduction dans le monde. Pour moi, un écrivain est égal à la cause qu'il défend et pas aux nombres de langues dans lesquelles il est traduit. C'est ça qui fait mon prestige.» Pour rappel, l'adaptation télévisuelle de son roman sera portée cette année à l'écran dans les pays arabes au cours du mois de Ramadhan et ce, par un réalisateur syrien, Najed Ansour avec comme vedette, une actrice algérienne, des Aurès.