«Il faut repousser la religion musulmane...dans la sphère privée, ne pas la laisser déborder sur la sphère publique, et je crois que le minaret est un débordement visuel sur la sphère publique», a déclaré dimanche la vice-présidente du Front national. Marine Le Pen a demandé purement et simplement l'interdiction des minarets en France. «Je pense qu'il ne faut pas qu'il y ait de minarets...Il faut arrêter l'ensemble de l'avancée des signes ostensibles qui est ressentie comme une provocation et qui crée un malaise profond chez les Français», a estimé la dirigeante du parti xénophobe qui a, dès les résultats du référendum suisse portant sur l'interdiction de la construction de minarets connus, applaudi et emboîté le pas à l'initiative de l'Union démocratique du centre, premier parti de la Confédération helvétique. Formation politique à l'origine du débat qui fait rage en Suisse et qui a fini par déteindre sur l'Hexagone. Si les sorties médiatiques aux thèses ouvertement racistes de la vice-présidente du Front national, qui suit pas à pas le chemin tracé par son père Jean-Marie Le Pen, adepte notoire de la torture pendant la guerre de Libération nationale, ne constituent guère une surprise, les premiers dérapages au sein du camp de la majorité présidentielle se sont manifestés de manière aussi brutale qu'inattendue. Sur fond de débat à propos de l'identité nationale, lancé par le ministre de l'Immigration, Eric Besson, le maire UMP (Union pour un Mouvement populaire) André Valentin, questionné lundi dernier sur l'utilité de débats de ce type, a répondu sans sourciller: «Ils sont indispensables...Il est temps qu'on réagisse, parce qu'on va se faire bouffer. Y'en a déjà dix millions. Dix millions qu'on paye à rien foutre.» André Valentin n'est pourtant que l'élu d'un modeste village (Goussainville qui se trouve dans le département de la Meuse) d'à peine une quarantaine d'âmes et qui n'est très certainement peuplé que de «bons Français». Inévitablement, la question de l'interdiction des minarets, provoquée par le référendum suisse et reprise par le Front national en France, sera au centre des débats qui animent déjà la société française à propos de l'identité nationale. Elle provoquera sans coup férir de chaudes joutes verbales au sein du palais Bourbon, qui abrite l'Assemblée nationale française, dès aujourd'hui à partir de 18 heures. En lançant le 25 octobre un débat d'une telle sensibilité (voulu par Sarkozy), Eric Besson n'a-t-il pas joué avec le feu? Les prémices de réactions aux relents racistes ne se sont pas fait attendre pour surgir et les discussions ont fini inévitablement, comme il fallait s'y attendre, par se cristalliser autour des populations immigrées, en particulier maghrébine et africaine de confession musulmane. Que pensent les Français de la religion musulmane et de ses lieux de culte? Un sondage Ifop révèle que 41% d'entre eux sont hostiles à la construction de mosquées tandis qu'un autre sondage effectué par BVA indique que 44% des Français interrogés, disent que la religion musulmane les inquiète plus que n'importe quelle autre religion. Il faut signaler que la religion musulmane est stigmatisée et fait l'objet d'attaques virulentes à travers le port du voile et plus récemment celui de la burqa dont un texte de loi en préparation devrait en interdire le port. «Elle n'est pas la bienvenue en France», avait déclaré le président de la République française au mois de juin 2009. Des thèmes sur lesquels surfe, avec une aisance extraordinaire, le Front national qui trouve à travers le débat sur l'interdiction des minarets qui a fini par s'inviter en France, du pain bénit. Marine Le Pen qui ne s'est pas fait prier pour s'en emparer et en faire un de ses slogans électoralistes favoris, pourfend le gouvernement sur son terrain de prédilection: celui de la peur et de la haine de l'autre. Un thème sur lequel elle compte ne pas céder un seul pouce à la formation politique, l'UMP, qui soutient Nicolas Sarkozy. La vice-présidente du FN n'a pas pris des gants pour mettre l'accent sur «la lâcheté du pouvoir» au sujet du débat qui s'est désormais installé dans l'Hexagone et qui tourne autour de l'édification et de l'architecture des mosquées. «Le gouvernement est si faible qu'il est incapable de donner la ligne sur les minarets...La question n'est pas de savoir si les minarets doivent faire 10, 12, ou 20 mètres de haut...la règle en France, c'est l'intériorité de la religion, la religion ne doit pas déborder sur l'espace public, c'est un des éléments de la paix civile et sociale», a ajouté la responsable du parti xénophobe. Sarkozy qui s'est jeté tête baissée dans la bataille des régionales, qui auront lieu au mois de mars 2010, a revigoré les rangs du Front national en prenant le risque de chasser sur ses terres.