Dans la rue ou les places publiques, les discussions se focalisent autour de cette fameuse rencontre. Le ton est donné par les habitués du Café central de la place des Martyrs à Alger. Les tables sont déjà occupées. Un groupe de clients s'est formé devant le comptoir. Deux jeunes serveurs s'attellent à satisfaire les demandes pressées des présents. Un vacarme règne dans l'établissement. C'est une véritable ruche humaine. Les palabres sont épiques. «Nous allons les battre encore une fois», tonne Omar, un jeune de 30 ans. Son visage affiche l'expression d'un homme en ébullition. Ses yeux clairs sont enflammés. Il fustige du regard son compagnon Madjid. La vingtaine entamée, ce dernier sirote calmement un café. Il esquisse un sourire malicieux. «Les Egyptiens ne se présenteront pas en victimes expiatoires», objecte-t-il. Cette remarque met Omar dans tous ses états. «Mais tu vas cesser avec cet air de défaitiste oui ou non?», lance-t-il à son ami. Farid intervient. «Calme-toi. Tu connais Madjid, il aime te taquiner.» Cet homme plein de bon sens arrive à calmer les esprits. Apparemment, les deux jeunes hommes portent beaucoup de respect à ce retraité de l'Education. A ses moments perdus, ce quinquagénaire s'adonne à la pêche. Sa sérénité, il l'a puisée de la mer. Le vieil homme a une grande histoire avec le large. La musique des vagues nous porte vers le haut. Nous sommes à Kouba. Rencontré aux alentours du stade Belhaddad, Réda, 34 ans, se montre confiant. «Vu le match qu'ils ont fourni face à la Côte d'Ivoire, les nôtres ont les moyens de battre l'Egypte.» En effet, les Verts ont montré un visage séduisant face aux Eléphants qu'ils ont écartés de la course au sacre final. Durant 120 minutes, ils ont mené la dragée haute à Drogba et ses camarades. «Cela montre que nous disposons d'un groupe capable de battre n'importe quelle équipe en Afrique», déduit Réda. Cela dit, le contexte du match prochain est différent. Il met aux prises deux adversaires hypermotivés. En plus de cela, sur le plan technique, les deux sélections se valent. Mohamed Mechati, 39 ans, n'est pas de cet avis. «Contre la Côte d'Ivoire, notre équipe a développé un volume de jeu impressionnant. Aussi, le match fut musclé et intense. Par contre le match d'hier (Egypte-Cameroune, joué lundi Ndlr) n'a pas tenu ses promesses», fait rappeler cet adjoint d'éducation. Et d'argumenter: «Les premier et deuxième buts de l'Egypte son des cadeaux offerts par la défense et le gardien adverses». Pertinente, cette appréciation conforte Sid Ali dans ses convictions. Agé de 46 ans, cet ancien émigré a évolué au Club Athlétique de Kouba. «Techniquement et physiquement, nous avons les atouts qui nous permettent de passer l'écueil égyptien», analyse ce connaisseur de la balle ronde à la barbe fournie et grisonnante. Le sourire qu'il affiche trahit une ferveur ardente pour les Vert. «Nous allons vaincre! C'est une question de principe», tranche-t-il. Cette affirmation est nuancée par A.S., une femme de 40 ans, fonctionnaire, rencontrée au niveau de la rue principale de Kouba. «Je suis optimiste mais méfiante. Le football n'est pas une science exacte», déclare spontanément cette dernière. Ses cheveux lâchés lui donnent l'allure d'une muse du Sahara. La brise les caresse. Ils vibrent comme les cordes d'un luth. Sur les ondes de l'éther, son sourire sème une ode dédiée aux Fennecs. L'ode éclôt. Elle prend les traits de A.F., la collègue de la muse. «Pour gagner, il faut garder les pieds sur terre», préconise cette femme à la quarantaine révolue. Ainsi, le big match Algérie-Egypte occupe toutes les discussions. Malgré le froid, la fièvre des retrouvailles entre les Fennecs et les Pharaons met la rue algérienne dans tous ses états. Qui l'aurait dit? Deux mois après la mémorable empoignade de Omdurmane au Soudan, les deux équipes se rencontrent une nouvelle fois. Et le match s'annonce des plus indécis. Pourvu que demain, les Verts rééditent l'exploit...