Ministres et parlementaires sont unanimes à souligner que c'est à la justice de traiter les dossiers de la corruption. Incompréhensible est la position que prône l'Exécutif face à un dossier aussi grave que celui de la corruption. Le silence est roi. Et quand l'appareil exécutif s'essaye à éclairer une opinion publique assoiffée d'informations, il ne fait qu'assombrir une situation déjà pas nette. Hier, le Premier ministre Ahmed Ouyahia a refusé de souffler mot sur ce dossier. Il donnera rendez-vous à la presse pour aujourd'hui. «Je vais animer une conférence après la réunion de l'Alliance dans laquelle j'aurais à m'expliquer sur les questions nationales.» C'est en ces termes qu'il s'est adressé aux journalistes en marge de la cérémonie de clôture de la session d'automne du Parlement. Mais il y a lieu de retenir qu'aujourd'hui, Ouyahia va troquer sa casquette de Premier ministre contre de celle du secrétaire général du RND. Cela donnera une tout autre dimension à ses positions. C'est bien évidemment un détail que Ouyahia ne perd pas de vue. Sur notre insistance, le Premier ministre finira par déclarer à L'Expression que «la justice fait son travail». Ouyahia n'enfonce pas les ministres dont les départements sont soupçonnés d'être impliqués dans des scandales de corruption mais il ne se risque pas à les défendre. La responsabilité pénale sera déterminée par la justice mais ce canal n'est pas nécessaire pour établir la responsabilité politique des ministres pointés du doigt. Ouyahia a refusé d'aborder ce débat affirmant qu'il relevait des prérogatives de la justice. Et pourtant, la question est différemment appréciée aussi bien au sein même de son staff que par d'autres partis.Lundi dernier, le président du Mouvement de la société pour la paix, M.Bouguerra Soltani, a accusé des parties dans le pouvoir de vouloir déstabiliser sa formation, en citant les ministres du MSP dans des dossiers de corruption. Hier, Chakib Khelil, le ministre de l'Energie et des Mines a eu une attitude de quelqu'un qui n'est pas du tout concerné par le scandale de Sonatrach. Il affirme, de prime abord, qu'il ne se sent pas obligé de démissionner. Mieux, il souligne que «le ministre ne dirige par Sonatrach, mais est responsable du secteur». Il pointe du doigt des «parties» qui attisent «le feux ailleurs». Bien sûr, il ne dit rien sur l'identité de ces parties. Il demande à la presse d'en tirer les conclusions. L'Algérie a-t-elle à faire à des fantômes? Et puis que cachent ces accusations répétées dirigées contre X? Le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, M.Yazid Zerhouni, replace le débat dans son contexte. Il commence par rappeler une évidence: «La corruption n'est pas propre à l'Algérie.» Mais selon les observateurs, c'est la manière de traiter ce phénomène qui pose réellement problème en Algérie. A ceux qui pensent le contraire, Zerhouni assure que les affaires qui sont apparues au grand jour ces derniers mois ne font pas partie d'une campagne mains propres. Il appelle, à partir de l'APN, les Algériens à ne pas se substituer à la justice. Le seul souci du citoyen est de connaître les responsables des scandales qui ont touché des secteurs aussi sensibles que ceux de l'énergie et des travaux publics. Par ailleurs, du côté du Parlement, l'on semble plutôt rassuré par la gestion du dossier de la corruption. Le président de l'APN, M.Abdelaziz Ziari, a ignoré totalement le dossier lors de son discours. Le président du Conseil de la Nation, M.Abdelkader Bensalah, a, lui, souligné que le traitement actuel de la question de la gestion des deniers publics et de la rationalisation des dépenses «était sur la bonne voie». Le président du Conseil de la Nation a, dans ce contexte, appelé à «laisser la justice faire son travail».