Invité par le Centre culturel français (CCF) pour présenter demain son dernier roman Yanvalou pour Charli, l'écrivain et poète haïtien, Lyonel Trouillot, a accepté de nous entretenir sur le séisme meurtrier qui a ravagé son pays, il y a plus de deux mois. «C'est difficile d'en parler, on ne peut pas tout dire en même temps. Quand il y a une ville qui s'effondre, on ne garde que des fragments de la catastrophe...», nous dira-t-il d'emblée concernant le séisme survenu à Haïti le 12 janvier dernier. Encore sous le choc, cet écrivain engagé, qui a refusé de quitter son pays et qui a combattu pendant longtemps la dictature de Duvalier, affirmera avoir toujours une étrange impression par rapport à ce qui s'est passé un certain mardi 12 janvier. «J'ai l'impression que ce n'était pas réel, que ce n'était pas vrai...» «Le Palais national et la Direction générale des impôts qui s'effondrent, une capitale détruite à 80% et puis il y a toujours ces questions qui reviennent: pourquoi telle maison qui s'effondre et pas telle autre? 300.000 morts, c'est en quelque sorte 300.000 histoires de morts à raconter, il y a aussi des milliers d'histoires de blessés, d'amputés et de survivants à relater...», nous confiera-t-il. Et de poursuivre: «Après avoir vécu tout cela, on a presque honte d'être vivant...En fait, ce n'est pas quelque chose sur laquelle on peut prétendre produire sur le champ un discours cohérent. Je pense que tout ce qu'on peut faire est de recueillir des témoignages mais finalement tous les récits en valent la peine et en même temps aucun n'en vaut la peine, c'est pour cela que nous, à Port-au-Prince, le soir, on parle d'autre chose. Comment tout dire?»