L'Algérie vient de participer à une réunion des pays qui ont en commun la langue française. Cette réunion a eu lieu cette semaine, en marge des travaux du Sommet mondial sur le développement durable qui se tient à Johannesburg en Afrique du Sud et auquel notre pays participe. C'est le Président de la République en personne, M.Abdelaziz Bouteflika, qui a pris part à cette rencontre de pays parlant la langue d'une des puissances occidentales qui comptent dans le monde. En effet, outre la France, la Tunisie, le Maroc, l'Egypte, la Mauritanie, le Gabon, le Sénégal, le Burundi, le Congo, le Burkina Faso, le Mali, le Viêtnam, le Laos, Monaco, Djibouti, le Canada, la Belgique, Madagascar et l'île Maurice ont participé à cette réunion. Néanmoins, les contextes régional et international dans lesquels se sont tenues ces retrouvailles francophones (hégémonie totale américaine sur le monde, conflit persistant au Proche-Orient, menaces d'intervention militaires U.S. en Irak, réorganisation de la diplomatie française dans le monde et, surtout, le prochain sommet de la francophonie prévu à Beyrouth au Liban le mois prochain), ont poussé les observateurs et autres analystes de ce genre de réunion, à s'interroger sur les tenants et les aboutissants de cette rencontre. Les questionnements se sont surtout focalisés sur la présence de l'Algérie à cette réunion alors qu'Alger ne fait pas partie des pays ayant adhéré à la communauté de la francophonie, même si elle souvent sollicitée pour le faire, et est présentée par certains, ici et ailleurs, comme le deuxième pays francophone après la France. Alors, prélude d'une prochaine adhésion officielle de l'Algérie à ce regroupement linguistique ou simple participation à un forum diplomatique se tenant à la faveur d'un sommet mondial réunissant les chefs d'Etat de divers horizons politiques et culturels? La question reste posée. Officiellement, les participants à la réunion des francophones ont procédé à un large tour d'horizon sur les principaux thèmes débattus par ce Sommet de la Terre de Johannesburg et ont abordé les points qui intéressent ces pays. Ainsi, les questions de la dette, tant celle des pays pauvres que celle qui mine les pays dits à revenu intermédiaire, l'ouverture des marchés du Nord aux produits du Sud, les implications de la mondialisation, l'appui au Nepad, le terrorisme, la coopération, le rôle des organisations internationales dans le règlement des conflits et, enfin, le dialogue entre les civilisations y ont été discutés. Prenant la parole à cette rencontre, le Président de ola République, Abdelaziz Bouteflika, a mis en exergue la volonté de l'Afrique de trouver les solutions profondes et durables à sa situation à travers la mise en oeuvre du Nepad qui constitue, selon lui, une approche adaptée et globale aux problèmes du continent. Mais, il a surtout mis l'accent sur les valeurs de tolérance entre les différentes cultures du monde en estimant que le dialogue des civilisations était de nature à jouer un rôle porteur dans la recherche de la paix. Or, le président français, Jacques Chirac, en parallèle avec la rencontre de ses pairs qui parlent français, avait proposé l'adoption par la communauté internationale de ce qu'il a appelé une Convention mondiale sur la diversité culturelle qui consacrerait le droit à l'exception culturelle face à l'uniformisation des modèles culturels dans le monde sous l'influence des Etats-Unis. Présidant une table ronde à ce sujet, il n'a pas hésité à affirmer qu'en dépit de ses atouts «la mondialisation menace la diversité». En somme, le chef de l'Etat français défend la langue et la culture de son pays devant les menaces d'hégémonie de l'anglais. Et, pour ce faire, il veut le maximum de pays à ses côtés à travers le forum de la francophonie, non sans avoir auparavant, engagé les actions et les moyens nécessaires à cette politique. En contrepartie, pour ces pays membres du regroupement francophone ou qui ont en commun le français et la culture inhérente à cette langue et notamment pour ceux parmi eux qui comptent, une plus grande compréhension de leurs problèmes de développement économique et social. Il faut mentionner, à ce propos, que dans sa toute nouvelle politique diplomatique, Paris vient d'annoncer la défense du principe de l'allégement de la dette pour les pays à revenu intermédiaire dont l'Algérie fait partie, alors que la France s'était tenue, jusqu'à présent, aux strictes règles très orthodoxes des institutions financières internationales en la matière. Alors, l'Algérie est-elle visée par tous ces marchandages, et, question subsidiaire, serait-elle présente officiellement au futur Sommet de Beyrouth sur la francophonie?