La région des Issers à Boumerdès est adaptée à la création d'un nouveau port près de la capitale. L'ancien directeur général du port de Béjaïa et consultant, Abdelkader Boumessila, n'y va pas par quatre chemins pour décrier la situation dans laquelle se trouvent actuellement les ports algériens. A commencer par celui d'Alger qui, selon lui, n'a plus sa raison d'être d'un point de vue économique. C'est en ces termes qu'il s'est exprimé hier lors d'une conférence à l'Ecole supérieure des affaires d'Alger à l'initiative du Cercle de réflexion autour de l'entreprise. Selon le conférencier, les efforts de modernisation effectués par l'émirati Dubaï World Port au port d'Alger vont vite être dépassés. La solution n'est pas d'adapter continuellement les anciens ports au nouveau trafic mais de construire de nouvelles structures qui intègrent les nouvelles donnes du commerce international. Et ce ne sont pas les exemples de cette mutation qui manquent. A l'Ouest, c'est Tanger au Maroc, qui est en train de devenir une plate-forme importante du commerce international. Et la ville tunisienne d'Enfidha a toutes les chances de constituer le même centre à l'Est. Reste l'Algérie qui ne peut même pas accueillir dans ses ports de gros porte-conteneurs ou des navires d'autres types. Les importateurs doivent alors aller chercher leurs marchandises dans des ports français. Des opérateurs économiques et des responsables d'administration ont été d'accord avec Boumessila qu'Alger n'a que faire de son port. Il doit être, selon plusieurs avis, dédié au tourisme en créant des restaurants, des échoppes ou d'autres. Personne ne conçoit le fait que le port soit fermé à la population. Alger tourne le dos à la mer, se sont plus à répéter plusieurs intervenants lors du débat ouvert après la conférence. Slim Othmani, président-directeur général de Rouiba, est de ceux-là. D'autres intervenants ont préféré consacrer leur temps de parole à des données purement économiques. Selon eux, il ne sert à rien de moderniser l'infrastructure portuaire si l'environnement économique du commerce extérieur n'est pas assaini. Le responsable des approvisionnements de Henkel aborde le problème du crédit documentaire. D'autres acteurs économiques, comme le consultant Ali Harbi, préfèrent être plus nuancés. Selon lui, un port ne sert pas qu'à importer ni à exporter d'ailleurs. Il nous a confié que le tourisme peut être un moteur de croissance. La réparation navale est un autre filon exploitable. La logistique autour des ports reste généralement faible. C'est ce qui est regretté par Souamès Hamadi, directeur à l'Agence nationale de développement de l'investissement. Actuellement, les ports sont gérés par l'Etat, mais ce n'est pas le seul modèle existant, dit-il. D'autres intervenants sont allés jusqu'à dire que ce modèle de gestion est appliqué même à l'ancienne zone franche de Bellara qui devait trouver son expansion en accord avec le port de Djen Djen à Jijel. Or, la gestion de cette structure était confiée à un wali. La gestion bureaucratique est aussi critiquée par Boumessila. Il donne l'exemple de la difficulté pour les Douanes algériennes de transiter vers l'échange de données informatiques. Ce qui n'est pas sans conséquence sur la fluidité et la transparence des échanges commerciaux. L'un des grands freins à cette expansion est aussi historique du fait que les ports algériens ont été conçus avant l'Indépendance. Produits agricoles, minerai et pétrole, à partir de 1960, étaient exportés. Actuellement, l'activité des ports est plutôt axée sur l'importation, ce qui ne fait pas appel à la même logistique. Toutes ces données permettent de mettre le doigt sur les risques guettant les ports algériens. Selon Boumessila, les dispositions perceptibles de DW Ports pour Enfidha font profiler une démarche de satellisation de Djen Djen par cet opérateur, l'empêchant de jouer un rôle de premier plan en Méditerranée.