Le dernier en date, un chef tribal, a été abattu hier alors qu'il rentrait chez lui, dans le district d'Arghandab de la province de Kandahar. Des hommes masqués roulant à moto et abattant un homme en pleine rue: c'est le nouveau cauchemar des responsables locaux à Kandahar, le berceau des taliban dans le sud de l'Afghanistan. La scène s'est produite une nouvelle fois dimanche soir au beau milieu d'un marché. Deux inconnus roulant sur une moto ont sorti leurs armes et tué Haji Abdul-Haï avant de remettre les gaz et de s'enfuir. La victime était un chef de tribu étroitement lié au gouvernement du président afghan Hamid Karzaï. Depuis la fin février et la mort d'Abdul Majid Babaï, un haut responsable local, 13 personnes, la plupart travaillant pour les autorités locales, ont été ainsi exécutées. La dernière a péri hier: Haji Abdul Raman, un chef tribal, a été abattu alors qu'il rentrait chez lui, dans le district d'Arghandab de la province de Kandahar. Les meurtres reproduisent souvent le même mode opératoire. Au moins quatre personnes, trois hommes et une femme, ont ainsi été tués par des hommes se déplaçant sur des motos. Les taliban ont revendiqué ces meurtres, un de leurs porte-parole accusant les victimes de «travailler pour le gouvernement fantoche» de M.Karzaï. La campagne d'assassinats «va continuer», a menacé Yousuf Ahmadi. «Beaucoup de personnes ont peur. J'ai peur», a indiqué un haut responsable à Kandahar sous couvert de l'anonymat. Selon lui, plusieurs fonctionnaires ont démissionné ou menacent de le faire par peur d'être tués. «Si ça continue, si on n'empêche pas les assassinats, je vous dis que beaucoup de responsables vont prendre contact avec les taliban pour se protéger», a-t-il ajouté. «Ce gouvernement ne peut pas nous protéger», estime Dost Muhammad, un boulanger de Kandahar. «Nous avions déjà beaucoup de problèmes avec les bombes et les attaques suicide des taliban. Désormais, nous avons un problème de plus. Tous les jours, j'écoute la radio pour savoir qui d'autre a été assassiné», dit-il. La crainte que ces assassinats ne s'étendent a poussé lundi l'ONU à ordonner à 200 de ses employés afghans de rester chez eux à Kandahar. «Nous réévaluons constamment nos mesures de sécurité», a déclaré le porte-parole des Nations unies en Afghanistan, Dan McNorton, précisant que les employés étrangers de l'ONU à Kandahar avaient été relocalisés à Kaboul. Certains quartiers de la ville de Kandahar, peuplée d'un million d'habitants environ, ainsi que d'importants territoires de la province sont sous le contrôle des taliban. Le président afghan a réuni ce week-end le Conseil de la sécurité nationale pour discuter des assassinats. Les responsables de la sécurité ont présenté à M.Karzaï un plan visant à endiguer ces attaques. «Le président suivra personnellement la situation», a précisé son porte-parole Waheed Omar. Cette vague de meurtres intervient alors que les forces internationales, emmenées par l'Otan mais dont plus des deux tiers sont composées de soldats américains, mènent depuis des mois des opérations à Kandahar et dans sa région. Le gros des renforts occidentaux est attendu cet été, lorsque le contingent étranger en Afghanistan passera de 126.000 à 150.000 hommes, selon des responsables militaires occidentaux. Selon le plus haut représentant civil de l'Otan en Afghanistan, Mark Sedwell, l'Otan a l'intention de mettre davantage l'accent sur le politique et moins sur le militaire.