Alors que le Proche-Orient bruisse de rumeurs d'une offensive d'Israël cet été au Liban, les experts de défense israéliens écartent ce scénario à moins que le Hezbollah prenne l'initiative d'une escalade. «Il est vrai que dans cette région, il y a toujours une possibilité de déflagration mais Israël n'a aucun intérêt à se lancer dans une telle aventure, et le gouvernement Netanyahu le sait parfaitement», estime le spécialiste de défense Reuven Pedatzur. La tension est remontée le mois dernier après que le président israélien Shimon Peres a accusé la Syrie de fournir des missiles Scud au Hezbollah, ce que ce dernier a démenti. S'il exclut une attaque israélienne, M.Pedatzur doute que le Hezbollah prenne de son côté le risque de provoquer une nouvelle guerre, après le conflit de l'été 2006, du moins dans le contexte actuel. «Il en irait autrement si Israël, avec un feu vert américain, attaquait les centrales nucléaires iraniennes. Dans ce cas l'Iran riposterait vraisemblablement par le biais du Hezbollah», souligne M.Pedatzur, un chercheur indépendant. Mais, selon lui, une telle attaque contre l'Iran n'est pas à l'ordre du jour malgré les menaces que les dirigeants israéliens font planer au cas où l'Occident ne parviendrait pas à empêcher Téhéran de se doter du nucléaire. Le quotidien Haaretz (gauche) évoque carrément une «paranoïa» de guerre en Syrie et au Liban. «Le problème d'Israël, c'est qu'il est très difficile d'apaiser une paranoïa. Il y a un tel degré de suspicion dans le monde arabe envers Israël que toute tentative de calmer les craintes ne font que les raviver», écrivaient récemment les correspondants défense du Haaretz, Avi Issacharof et Amos Harel. Ces craintes, relève l'orientaliste Eyal Zisser, s'expliquent par le fait que «les Libanais et les Syriens sont sur la défensive». «L'expérience passée a convaincu les pays arabes, que les menaces, qu'elles soient israéliennes ou américaines, sont suivies d'effet et même de guerres», note ce professeur de l'université de Tel-Aviv. De fait, les Etats-Unis et Israël ont multiplié les mises en garde au Hezbollah. Le secrétaire américain à la Défense Robert Gates, dont le pays classe le Hezbollah parmi les organisations «terroristes», a accusé l'Iran et la Syrie de fournir au mouvement chiite libanais des roquettes et des missiles «aux capacités de plus en plus importantes». La Syrie a démenti. Le Liban «devra rendre des comptes» si la situation empire dans la région, a averti la semaine dernière le ministre israélien de la Défense, Ehud Barak, en dénonçant une nouvelle fois des transferts d'armes au Hezbollah. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a toutefois catégoriquement démenti la semaine dernière que son pays ait l'intention d'attaquer la Syrie. M.Zisser écarte l'hypothèse d'une offensive dont «Israël ne tirerait aucun bénéfice», jugeant peu crédible que le gouvernement israélien veuille par ce moyen détourner l'attention des impasses dans le dossier iranien ou le processus de paix israélo-palestinien. Il relativise la déclaration du président Peres sur les Scuds, soulignant qu'elle «n'a pas été reprise» par le gouvernement israélien. De son côté, un porte-parole militaire israélien, interrogé par une agence de presse, a refusé de confirmer ou démentir les informations selon lesquelles le Hezbollah serait équipé de Scuds, d'une portée de 300 km. Toutefois, l'armée israélienne évalue à plus de 40.000 le nombre des roquettes dont disposerait le Hezbollah, certaines capables d'atteindre les métropoles d'Israël. Durant la dernière guerre du Liban (été 2006), le Hezbollah avait tiré plus de 4000 roquettes contre le nord d'Israël, contraignant un million d'habitants à se terrer dans des abris ou à fuir vers le sud du pays.