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PRIX, SALAIRES ET EMPLOI
Publié dans L'Expression le 16 - 05 - 2010

Le gouvernement doit agir rapidement s'il veut éviter une flambée des prix lors du Ramadhan.
A quoi auront servi les milliards de dollars investis en principe pour améliorer le quotidien des travailleurs, si ces derniers continuent d'estimer que leurs salaires sont insuffisants et ne peuvent leur garantir une subsistance décente? Cette interrogation est parmi les questions posées par les cheminots en grève depuis bientôt une semaine pour réclamer une amélioration de leur pouvoir d'achat. Ils se plaignent aussi de n'avoir été soutenus que du bout des lèvres par le secrétaire général de l'Ugta, Abdelmadjid Sidi Saïd, qui préfère refiler le dossier à son secrétaire national chargé des conflits sociaux.
Certains syndicats ne sont même pas dans la capacité de tenir leurs réunions faute de locaux. Ils sont, en quelque sorte, obligés d'adhérer au pacte économique et social qui vise à étouffer toute contestation sociale. Gouvernants et certains patrons de syndicats des travailleurs sont convaincus que la paix sociale est à ce prix. Ce qui n'est pas loin de suggérer que ce sont les travailleurs qui sont à l'origine des menaces. Du fait que les syndicats sont réduits au silence, c'est à El Hachemi Djaâboub, ministre du Commerce qu'échoit la tâche de s'inquiéter du sort des travailleurs. Il commence par recevoir des instructions de la part du Conseil des ministres pour réorganiser les marchés et, de la sorte, tenter de mettre de l'ordre dans la jungle des prix des produits de large consommation. Cette exigence est directement liée à la question du pouvoir d'achat. On voit bien que la semaine écoulée n'a pas été exempte de préoccupations directement inspirées du quotidien des citoyens. Mais cet intérêt, qui n'est pas fortuit, est loin d'être suffisant pour atténuer leurs souffrances. On fait du Ramadhan un marqueur social très fort pour opérer une traçabilité de la pauvreté. Cela ne manquera pas de révéler que les ventres vides sont encore légion, au grand dam du ministre des Affaires religieuses, qui a reçu des informations d'on ne sait où, pour affirmer le contraire.
D'ailleurs, la contradiction, c'est son collègue du gouvernement, chargé de la Solidarité qui la lui sert. Des pauvres, il y en a et ils ne se rendront pas à la soupe populaire. Cela fait trop «tiers-monde». Un chèque, cela symbolise une pauvreté plus chic.
Recevoir un chèque, c'est aussi aller faire son marché comme tout le monde. Et les marchés, c'est l'autre gros morceau auquel le gouvernement veut s'attaquer. En les nationalisant ou presque. En plus du fait que le gouvernement veut réguler les prix en plafonnant les marges bénéficiaires, il veut aussi s'attaquer aux spéculateurs. Ce qui lui donnera du fil à retordre. Car tant que le pays importera une grande partie de sa nourriture, il y aura toujours des marchands qui se sucreront sur le dos du consommateur.
D'ailleurs, d'autres produits comme le médicament et le ciment sont aussi la proie de spéculateurs. On n'hésite même plus à opérer des tentatives de sabotage de Saidal pour affaiblir ses capacités de production et recourir à l'importation. Et les usines de ciment connaissent des problèmes, ouvrant la voie à l'importation de quantités supplémentaires de ce matériau. Même s'il n'est pas sûr que les travailleurs soient nécessairement partie prenante de cette tactique, cela n'empêche pas certains de se délecter de leurs malheurs.
Cette semaine encore, la grève de la Sntf a révélé qu'un gros business se tisse derrière son dos. La flotte de camions disponibles à travers le pays fonctionne à plein régime pour convoyer les marchandises vers leurs destinations. Amoindrissant davantage le plan de charge de la société sans que la tutelle ne lève le petit doigt, préférant pousser les choses au pourrissement. Il y a même des propriétaires de camions qui incitent les enfants à cisailler les câbles des wagons pour immobiliser les trains à quai et se charger ainsi de transporter le minerai vers les usines de l'est du pays, ont témoigné des travailleurs.
C'est à la fois un complot contre les cheminots et le service public qui tire 80% de ses ressources du transport des marchandises. Personne ne se réveillera avant la mise à genoux de l'entreprise.
A ce moment-là, la solution de la cession au privé, local ou étranger, jaillira comme par miracle. Sans même être certain que le personnel sera maintenu. Il est passé de 18.000 à 1000 en quelques années.


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