A Och, les opérations de déblaiement se déroulaient dans le calme et, par endroits, les habitants ouzbeks aidaient même les militaires. L'armée du Kirghizistan a commencé hier à lever les barricades bloquant l'accès aux quartiers ouzbeks dévastés à Och, épicentre des récentes violences interethniques dans le sud. La veille, les autorités avaient promis une enquête sur les émeutes à un émissaire américain en visite à Bichkek et avaient prolongé l'état d'urgence alors que subsistent des craintes de nouveaux affrontements. Hier matin, des véhicules blindés poussaient sur le bas côté des rues les camions, piliers en béton et arbres qui servaient à barricader les districts ayant le plus souffert dans les affrontements qui ont fait des centaines de victimes et provoqué un afflux de réfugiés en Ouzbékistan. A Och, les opérations de déblaiement se déroulaient dans le calme et, par endroits, les habitants ouzbeks aidaient même les militaires, bien qu'ils accusent l'armée d'avoir participé avec la communauté kirghize aux violences ayant visé leur minorité. «L'opération se passe très bien», relevait le lieutenant-colonel Jounous Kalmatov. Samedi, le maire d'Och, Melisbek Myrzakmatov, avait fixé un ultimatum pour la levée des barrages aux entrées des quartiers ouzbeks avant 12h00 GMT hier, faute de quoi les autorités menaçaient de «recourir à la force». Ces déclarations laissaient craindre une nouvelle flambée de violence, les tensions restant vives entre Kirghiz et les autorités d'un côté et les Ouzbeks de l'autre. Observant la levée des barricades par deux blindés dans le quartier de Chahid-Tepa, un des habitants a dit craindre une reprise des affrontements, tout en espérant un retour à la normale. «Bien sûr qu'on a peur. Mais on ne remettra pas les barricades si ça reste calme. La vie doit reprendre son cours normal à un moment ou un autre», a dit ce retraité de 64 ans, dont l'un des frères a été tué dans les affrontements. Le gouvernement provisoire a cependant décidé samedi de prolonger jusqu'au 25 juin l'état d'urgence et le couvre-feu en vigueur à Och et les districts avoisinants. Ces mesures étaient censées s'achever dimanche. Les violences entre les communautés kirghize et ouzbek qui ont éclaté dans la nuit du 10 au 11 juin à Och, deuxième ville du pays, avant de se répandre dans la région voisine de Djalal-Abad, ont fait jusqu'à 2000 morts, selon la présidente kirghize par intérim, Rosa Otounbaïeva. Plusieurs centaines de milliers de personnes se sont réfugiées en Ouzbékistan ou ont été déplacées à l'intérieur de ce petit pays d'Asie centrale. Pour l'instant, à peine plus de 4500 réfugiés en Ouzbékistan sont revenus au Kirghizistan, selon les garde-frontières kirghiz. A l'issue de rencontres samedi à Bichkek, Robert Blake, sous-secrétaire d'Etat américain chargé de l'Asie centrale et du sud, a déclaré que des membres du gouvernement intérimaire l'avaient «assuré» de leur «intention de lancer une enquête» sur les émeutes.